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Les Journalistes Pris En Otage Dans L'offensive Contre Le PKK

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    LES JOURNALISTES PRIS EN OTAGE DANS L'OFFENSIVE CONTRE LE PKK
    Stephane

    armenews.com
    jeudi 12 janvier 2012

    Alors que l'offensive militaire s'intensifie dans l'est de la Turquie
    et jusque dans les pays voisins, la presse est plus que jamais prise en
    otage dans l'affrontement entre les autorites et les rebelles kurdes du
    PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan, interdit). Procès en cascade,
    detentions prolongees, et maintenant directives gouvernementales a
    destination de la presse... L'amalgame entre combattants rebelles et
    journalistes abordant la question kurde d'un point de vue critique
    se perpetue, au nom de la lutte antiterroriste.

    Parallèlement, les inquietudes montent quant a la volonte du
    gouvernement de contrôler l'information sur l'offensive en cours.

    En prison pour une interview ?

    La justice turque persiste a assimiler a de la " propagande ", un crime
    passible de plusieurs annees d'emprisonnement, le fait de publier
    des interviews de membres du PKK. Et ce, meme si le commentaire qui
    en est fait est loin d'etre elogieux.

    La journaliste du quotidien liberal Taraf, Nese Duzel, et son redacteur
    en chef Adnan Demir, sont ainsi poursuivis du fait de deux reportages
    publies en avril 2010, qui contenaient des interviews d'anciens
    dirigeants du PKK, Zubeyir Aydar et Remzi Kartal. Le 14 octobre,
    le procureur de la 11e chambre de la cour d'Assises d'Istanbul a
    requis sept ans et demi d'emprisonnement. La prochaine audience doit
    se tenir le 9 decembre. Le meme tribunal continuera d'instruire, le
    26 octobre, le procès du journaliste Ertugrul Mavioglu. Ce dernier
    est poursuivi pour un reportage publie en octobre 2010 dans Radikal,
    et qui contenait une interview d'un responsable du KCK (Union des
    communautes du Kurdistan, decrite comme la branche urbaine du PKK),
    Murat Karayilan.

    Sept ans et demi de prison sont egalement requis contre Recep
    Okuyucu, correspondant de Taraf dans la province de Batman (Sud-Est)
    et redacteur en chef du journal local Batman Medya. Le parquet de
    Diyarbakir (Sud-Est) lui reproche notamment de s'etre connecte 53 848
    fois au site de l'Agence de presse Euphrate (ANF, www.firatnews.org),
    bloque par les autorites qui le considèrent comme un relais du PKK. Le
    journaliste s'est defendu en rappelant que sa profession l'obligeait
    a se connecter chaque jour aux sites les plus divers.

    Recours massif a la detention preventive

    Le chroniqueur et ancien directeur de la publication du quotidien
    en langue kurde Azadiya Welat, Tayyip Temel, a ete interpelle le 4
    octobre a Diyarbakir, puis place en detention. Il a ete interroge
    pendant 15 heures par sept procureurs dotes de pouvoirs speciaux,
    avec 35 autres personnes suspectees d'appartenir au KCK.

    Des charges ont enfin ete presentees, fin septembre, contre deux
    journalistes de l'agence de presse pro-kurde Diha (Dicle Haber Ajansi)
    incarceres depuis le 15 avril. Kadri Kaya, chef du bureau de l'agence a
    Diyarbakir, et Erdogan Alkan, correspondant a Batman, sont passibles de
    vingt ans de prison pour " collaboration " avec le PKK et " propagande
    " en faveur de cette organisation. Ils comparaitront pour la première
    fois devant la 7e chambre de la cour d'Assises de Diyarbakir le
    2 novembre. On leur reproche essentiellement leur couverture des
    operations armees turques et des manifestations kurdes.

    Erdogan Alkan est egalement mis en cause pour avoir couvert le procès
    d'un " gardien de village " (membre d'une milice paramilitaire locale
    associee a l'armee turque), accuse d'abus sexuel sur un mineur
    a Batman. Couverture dont le but etait, selon l'accusation, de "
    rabaisser la place des forces de l'ordre aux yeux de la societe ".

    Le correspondant de Diha a Mersin, Aydin Yildiz, a ete interpelle le
    1er octobre alors qu'il sortait des locaux du quotidien pro-kurde
    Ozgur Gundem. Transfere a Gaziantep pour interrogatoire, il a ete
    place en detention, tout comme l'editeur du quotidien, Kazim Seker,
    interpelle le 4 octobre a Istanbul. La directrice de publication
    d'Ozgur Gundem, Eren Keskin, par ailleurs avocate, a ete sanctionnee
    par un " avertissement " du barreau d'Istanbul pour avoir evoque le "
    Kurdistan " dans une conference prononcee... en 2004. Le barreau a pris
    cette decision suite a la condamnation de la journaliste a dix mois de
    prison avec sursis et une amende de 3000 LT (1200 ~@) par un tribunal
    d'Urfa (Sud-Est), confirmee par la Cour de cassation en mai 2010.

    Dans un entretien a Radikal le 11 octobre, le ministre en charge
    des negociations avec l'Union europeenne, Egemen Bagis, a affirme
    que le gouvernement etait lui aussi gene par le recours excessif de
    la justice turque a la detention provisoire. D'après lui, le premier
    ministre Recep Tayyip Erdogan aurait demande au gouvernement de faire
    des recherches sur l'usage de la detention provisoire en Europe afin
    d'elaborer des recommandations. " Limiter la detention provisoire
    figure depuis longtemps parmi nos principales recommandations aux
    autorites turques, a declare Reporters sans frontières. Nous saluons
    l'initiative du gouvernement en la matière, qui pourrait constituer
    un tournant important. Les actes doivent maintenant suivre les
    engagements, et ce, dans toutes les regions du pays. "

    La couverture des manifestations criminalisee

    Emine Altinkaya, reporter pour Diha a Ankara, a ete remise en liberte
    fin septembre dans l'attente de son jugement, après dix mois de
    detention preventive. Elle avait ete interpellee le 27 novembre
    2010 alors qu'elle couvrait une manifestation dans la capitale. Le
    jugement de deux correspondants de Diha a Istanbul, Safiye Alagas et
    Olcay Kizilpinar, accuses de " collaboration " avec le PKK, doit aussi
    etre rendu prochainement. Ils avaient ete interpelles en marge d'une
    marche organisee par le candidat du BDP (parti pro-kurde, autorise)
    Sirri Sureyya Onder, le 30 juillet. Leurs appareils photo ainsi que
    leurs telephones portables, cartes SIM, cles USM et un ordinateur
    portable sont retenus comme pièces a conviction.

    Directives gouvernementales pour la presse

    Plusieurs associations professionnelles turques ont vivement critique
    la rencontre organisee par Recep Tayyip Erdogan avec les proprietaires
    et directeurs de la publication de plusieurs medias nationaux, le
    21 octobre. Le premier ministre a incite les journalistes a faire
    preuve de recul dans leur couverture du conflit, a ne pas relayer
    la propagande du PKK, et a prendre en compte les consequences de
    leur travail.

    Plus inquietant, cinq des principales agences de presse turques ont
    annonce, dans un communique joint publie le 24 octobre, qu'elles
    s'engageaient a obtemperer : " Des principes communs ont ete adoptes
    concernant la couverture des incidents terroristes ", ont declare
    l'Agence Anatolie (AA), AHT, ANKA, CIHAN et IHA. En particulier,
    elles s'engagent a " prendre en compte l'ordre public ", " garder une
    certaine distance par rapport aux interpretations donnant raison a la
    peur, au chaos, a l'hostilite, a la panique et a l'intimidation ",
    " ne pas inclure dans [leurs] publications de propagande pour des
    organisations illegales ", et surtout, " se conformer aux interdits
    de publication des autorites competentes ". " Les informations et
    les images seront transmises aux abonnes en tenant compte de leur
    utilite sociale et de la solidarite ", est-il encore precise.

    " On esperait que l'epoque où les autorites donnaient aux medias des
    directives pour la couverture des sujets les plus sensibles etait
    revolue en Turquie. L'engagement des principales agences de presse
    a observer la ligne officielle, dans une formulation extremement
    vague, fait aujourd'hui peser de serieuses menaces sur la liberte
    de l'information, a declare Reporters sans frontières. Les agences,
    chargees de fournir en contenu l'ensemble des medias, vont-elles
    de leur plein gre participer au black-out ? Minimiser l'ampleur
    des pertes humaines ou passer sous silence certaines operations ne
    servira qu'a accroître la mefiance envers les medias. Une information
    complète et objective sur la situation a l'est du pays est un prealable
    indispensable pour parvenir a une solution pacifique de la question
    kurde ".

    Dans ce contexte, l'accord securitaire entre Paris et Ankara signe le
    7 octobre 2011, dont le ministre de l'Interieur Claude Gueant assure
    qu'il " va bien au-dela des accords que la France signe habituellement
    dans le domaine de la securite ", suscite des interrogations. "
    Nous esperons que les autorites francaises feront preuve de plus de
    discernement que leurs homologues turcs en matière de lutte contre
    le terrorisme. Nous les appelons a ne pas ceder a l'approche confuse
    et repressive d'Ankara, qui multiplie les victimes collaterales y
    compris parmi les journalistes ", a declare Reporters sans frontières.

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