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Les amalgames inacceptables de Brice Couturier

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    France Culture
    Les amalgames inacceptables de Brice Couturier


    Dans son éditorial du jeudi 2 janvier à 8h20 sur France Culture
    consacré aux différentes formes de l'antisémitisme Brice Couturier
    explique : « Or voilà qu'est apparu un antijudaïsme d'un type nouveau.
    Il a plusieurs sources. Il est d'abord le produit de la concurrence
    mémorielle. Comme le disait Jean-Michel Chaumont, tous les groupes
    s'estimant victimisés, Noirs, Arméniens, victimes du communisme dans
    les pays de l'Est, Palestiniens, disputent aux Juifs le paradoxal
    privilège de victimes ultimes. Dieudonné ne cesse de proclamer que la
    mémoire de l'esclavage a été oblitérée par celle de la Shoah. L'hymne
    de ses spectacles s'appelle le shoannanas etc. »

    Chacun des groupes mentionnés appréciera, Ã sa manière, de voir ses
    combats assimilés aux fulminations négationnistes d'un provocateur
    comme Dieudonné et d'être dans la foulée ramenés au rang d'acteur de
    la concurrence des mémoires génératrice d'antisémitisme. En ce qui
    concerne en tout cas les Arméniens ( pour une fois cités sur cette
    fréquence, il sont si souvent `oubliés` !), cet amalgame est grave et
    inacceptable. Et on ne peut qu'être consterné, en particulier dans ce
    contexte particulièrement sensible, par la façon dont on essaye de les
    opposer aux Juifs sur une radio de service public.

    Aucune organisation arménienne n'a jamais contesté le martyr des Juifs
    et le fait que la Shoah constitue de par le nombre des victimes et
    l'étendue du crime, le plus grand génocide du XXe siècle. Mais elles
    ne sauraient accepter que leur lutte pour la reconnaissance de
    l'entreprise d'extermination du peuple arménien en 1915 soit présentée
    comme une tentative de minimiser l'Holocauste ou de porter atteinte Ã
    la mémoire ou à la dignité de tout autre groupe. Le laisser entendre,
    c'est vraiment regarder les choses par le tout petit bout de la
    lorgnette et c'est surtout dénier aux fils des rescapés arméniens le
    droit de défendre la vérité et la justice face à un Etat turc
    structurellement négationniste qui a fait de la « lutte contre les
    allégations de génocide » une priorité de sa politique étrangère. Une
    diplomatie qui pèse jusqu'Ã aujourd'hui, Ã travers un chantage
    économique systématique, sur la manière dont nombre de pays dont la
    France souhaiterait légiférer sur le négationnisme. Parallèlement,
    c'est aussi laisser croire que le judaïsme considérerait comme une
    concurrence le combat des Arméniens et plus largement celui des autres
    damnés de la terre. Est-il possible de raisonner ainsi et de répandre
    sur les ondes d'un média à vocation intellectuelle et élitiste pareils
    (bons ?) sentiments érigés en axiomes de base? ?

    Sans remonter à Henri Morgenthau, à Franz Werfel, à Raphaël Lemkin qui
    se sont portés aux avant-postes de la défense des Arméniens, comment
    occulter, pour rester en France et à l'époque contemporaine, la
    solidarité des Juifs à l'égard de ce peuple ? Faut-il rappeler depuis
    plus de vingt ans tous les noms des signataires des pétitions en
    faveur de la reconnaissance du génocide de 1915, de Pierre
    Vidal-Naquet jusqu'Ã Alain Finkielkraut, sans compter les
    organisations comme le Crif, le mémorial de la Shoah et bien d'autres
    ? Doit-on citer les présidents successifs de l'UEJF qui battent la
    semelle au premier rang des manifestations pour la pénalisation du
    négationnisme du génocide arménien, sans parler des personnalités
    comme Serge Klarsfeld, Lef Forster etc. ? En sens inverse, faut-il
    mentionner les Justes arméniens, les Missak Manouchian et tous ceux
    qui par solidarité avec les Juifs, ont donné leur vie dans la lutte
    contre le nazisme? ? Est-il nécessaire d'évoquer ce monument au coeur
    d'Erevan dédié aux martyrs des génocides juif et arménien? ?

    Y a-t-il une concurrence des mémoires? ? Bien sûr qu'elle peut exister
    Ã la marge, chez certaines individualités parmi les deux groupes.
    Est-ce suffisant pour en tirer une loi générale? ? Ce serait tomber
    dans le piège de l'intolérance et participer à la division des peuples
    qui ont tant souffert tout au long de leur histoire de la barbarie et
    du racisme. Ã ces tentatives indignes ou irréfléchies, fussent-elles
    le fait de personnes animées par les meilleures intentions du monde,
    on ne peut qu'opposer les mots de Bernard-Henri Lévy prononcés au
    meeting du CCAF (Conseil de coordination des organisations arméniennes
    de France) Ã la Mutualité, en janvier 2007 et auquel participait un
    certain François Hollande : « A ceux qui seraient tentés de jouer au
    sale petit jeu qu'est le jeu de la guerre des mémoires et de la
    rivalité victimaire, je veux répondre ce soir en plaidant pour la
    fraternité des génocidés. C'est la position du philosophe tchèque Jan
    Patocka, quand il invente la formule magnifique de la `solidarité des
    ébranlés`. C'était concernant spécifiquement les Arméniens, la
    position des pionniers d'Israël, des premiers habitants du Yishouv,
    qui, tous, se sentaient un destin commun avec les Arméniens naufragés.
    Ne nous y trompons pas, la lutte contre le négationnisme ne se divise
    pas. Les deux mécanismes sont sont si voisins, la tentative de les
    nier est, dans les deux cas, si incroyablement semblables, que laisser
    une chance à l'un équivaudrait à ouvrir une brèche à l'autre... »

    Ara Toranian

    samedi 4 janvier 2014,
    Ara ©armenews.com



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