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De Der Zor à Maïdanek banalisation du Génocide en Scandinavie par Su

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    GENOCIDE
    De Der Zor à Maïdanek banalisation du Génocide en Scandinavie par
    Suzanne Khardalian



    Un essai sur les cendres de Maïdanek de Suède, et l'exposition
    `alternative` de la Bibliothèque Royale du Danemark.

    L'Exposition sur le Génocide Arménien

    Deux événements scandaleux se sont produits la semaine passée en
    Scandinavie. Leur origine remonte à il y a deux ans, lorsque le Musée
    et Institut du Génocide Arménien d'Erevan avait entrepris d'organiser
    une petite exposition sur le thème de la Scandinavie et du Génocide
    arménien. L'exposition avait amorcé sa tournée des capitales
    scandinaves cette année, et il y a à peu près un mois, elle était
    arrivée dans la capitale danoise, Copenhague, où elle fut installée
    dans une salle appartenant à la Bibliothèque Royale ( tout en étant
    située dans l'Université de Copenhague). La surprise est venue lorsque
    le directeur de la Bibliothèque Royale, Erland Kolding Nielsen,
    annonça dans son discours d'ouverture qu'il y aurait une exposition `
    alternative ` organisée par l'Ambassade turque, et titrée, ` Le
    soi-disant Génocide arménien `. Que faire ? Protester, bien sûr.
    Évidemment, la Bibliothèque Royale a attiré depuis la lourde critique
    de média et d'historiens sur sa décision. Nielsen, cependant, a nié
    que l'institution se soit mise à genoux sous la pression de la
    Turquie.

    ` Nous leur avons simplement donné la possibilité de montrer leur
    exposition alternative `, a-t-il dit. Ainsi, pour l'instant, c'est une
    affaire normale. L'exposition est toujours prévue.

    La seconde histoire est tout aussi scandaleuse. Cette fois, elle se
    déroule dans la petite ville de Lund, au sud de la Suède, célèbre pour
    son université prestigieuse. Une galerie d'art y avait décidé
    l'organisation d'une exposition spéciale, et avait rapidement exposé
    l'`uvre d'un artiste, Carl Michael von Hausswolff, qui avait eu
    recours à l'emploi de cendres qu'il avait récupérées à Maïdanek, un
    camp d'extermination nazi, pour ses peintures monochromes. Une
    peinture faite à partir des cendres des victimes de la Shoah pour être
    vues de tout le monde.

    L'exposition controversée a été retirée à la suite des protestations
    du Centre Simon Wiesenthal - qui avait qualifié la peinture de `
    sacrilège ` et d' ` abomination ` - et de celles de la communauté
    juive de Malmö. L'exposition ` alternative ` organisée par la
    Bibliothèque Royale à Copenhague est cependant toujours prévue, et
    soulève d'importantes questions relativement au négationnisme et au
    révisionnisme. Et pourtant, les deux incidents n'ont en quelque sorte
    que très peu attiré l'attention des médias, en particulier celle des
    media arméniens.

    La cible était deux crimes, deux génocides. Et les efforts sans fin
    pour banaliser les crimes.

    Le peintre d'aquarelle qui a employé les cendres garde lui aussi le
    silence. Ou peut-être, allez savoir, il se réjouit du bruit qu'il a
    créé par son art. Une chose est sûre, il ne peut pas avoir ignoré
    l'attention que lui a portée la presse du monde. Un certain nombre de
    media polonais ont souligné le débat, tout comme la plupart des
    journaux israéliens, le Telegraph, et la presse française et
    espagnole. Des débats sur les répercussions ont eu lieu immédiatement.
    Un procès sera-t-il fait à Von Hauswolff à Lund ? La police
    devrait-elle saisir l' ` aquarelle `. La police ouvrira-t-elle une
    enquête pour ` violation de sépulture ` ? Cela était-il illégal ?

    Et pour autant, la Suède a gardé le silence. Le peintre n'est pas seul
    à garder le silence. Les organisations politiques et religieuses de
    Suède, les syndicats, les artistes gardent eux aussi le silence.
    Apparemment, il n'est pas indécent en Suède de profaner les victimes
    de génocide.

    Si le silence en Suède m'a déçue, l'histoire de Copenhague m'a rendue
    furieuse. Le silence a même été plus grand dans le cas de l'exposition
    ` alternative ` turque du Danemark.

    Tout ce que j'ai pu trouver, ce sont des protestations en sourdine, et
    une attitude ` le mieux est de l'ignorer `.

    Mais le négationnisme n'est pas chose nouvelle en Scandinavie.

    En 2005, Uffe Ostergaard, le directeur d'un département d'études sur
    l'Holocauste et le génocide de Copenhague , s'était impliqué dans la
    préparation d'une institution ` neutre ` ou ` lieu de dialogue ` où `
    la question ` des ` tragiques événements de 1915 ` pourrait être
    discutée entre spécialistes arméniens et turcs. L'initiative était
    soutenue par l'ambassadeur turc à Copenhague, Fugen Ok. Ostergaard
    avait fait siennes les vues négationnistes, publiquement et sans
    équivoque pendant plusieurs années, tout en soutenant avec insistance
    et en permanence qu' entre le point de vue arménien et celui des
    Turcs, sa position était ` neutre `.

    La présentation avait l'air parfaitement innocente (les mots ` neutre
    ` et ` dialogue ` sont naturellement attrayants) ; tout comme l'emploi
    du terme ` alternative ` pour qualifier l'exposition en réponse au
    Génocide arménien.

    A cette époque, les spécialistes Torsten Jorgensen et Matthias
    Bjorlund avaient écrit dans une lettre ouverte : ` ...Toute thèse
    selon laquelle il y a une ` position neutre ` entre une partie `
    arménienne ` et une partie ` turque ` sur la ` question ` du Génocide
    arménien est tout simplement fausse. S'agissant de la réalité
    historique du Génocide arménien, il n'y a pas de partie ` arménienne `
    ou ` turque ` de ` la question `, pas plus qu'il n'y a de partie `
    juive ` ou ` allemande ` de la réalité historique de l'Holocauste. Il
    y a une partie scientifique, et une partie non scientifique,
    reconnaissance ou négation `.

    Il y a quelque chose de fondamentalement faux dans les attitudes
    mentionnées dans ce qui précède. Ce à quoi nous assistons est le
    manque total de courage et de détermination morale. Au nom de
    l'objectivité, nous voyons le révisionnisme et la négation. Mais
    l'objectivité, qu'est-ce que c'est ? En termes simples, une tentative
    pour montrer ouvertement les bases d'un choix, un point de vue. Mais
    j'ajouterais la chose suivante : l'objectivité ce n'est pas la même
    chose que le jugement, libre ou sans conséquence.

    J'emprunterai quelques idées à Martin Wiklund, un chercheur de
    l'Université de Göteborg et auteur du livre History as a Court of
    Justice [L'Histoire Comme Une Cour de Justice], dans lequel il
    soutient de façon convaincante que les historiens devraient avoir le
    courage de maintenir une attitude moralement responsable et adopter
    une position. Il suggère qu'un tribunal comme modèle de justice
    pourrait servir de ligne de conduite pour une science qui devrait
    s'interdire toute abstention.

    Ce qu'il y a en commun à l'histoire et à un tribunal est que les deux
    devraient aspirer à administrer la justice, soutient Wiklund, et il a
    raison. Dans un procès de tribunal ordinaire, toutes les parties sont
    entendues, tous les faits qui s'y rapportent sont présentés et il en
    est tenu compte comme il convient. Une décision de justice signifie
    qu'une autorité reconnue (juges et jurés) évalue objectivement les
    intérêts de toutes les parties concernées ( demandeur, défenseur,
    procureur, le droit). Nous n'espérons pas seulement que le procès soit
    équitable, nous voulons aussi qu'il donne lieu à une décision : il ne
    peut pas se terminer sur une simple compréhension des circonstances.
    En d'autres termes, dans un tribunal, l'objectivité n'est pas un
    problème et elle ne nuit en rien à la justice.

    Il est vrai qu'un historien n'a pas vocation à prononcer un jugement,
    mais il ne devrait pas s'interdire de le faire lorsqu'il le faut. Il y
    a une conception très répandue dans les cercles universitaires selon
    laquelle les générations actuelles ne devraient pas s'ériger en juges
    des générations qui précèdent, en particulier parce que nos normes
    actuelles peuvent être révisées. Cette vision, pour autant, n'est pas
    raisonnable. Si tel était le cas, les juges ne pourraient rendre la
    justice parce que le droit, lui aussi, peut être changé au cours du
    temps.

    Les historiens n'ont pas à leur disposition des lois leur permettant
    de juger par référence à elles, mais s'inspirant du cas de la justice,
    nous pouvons appliquer les principes actuels aux conditions passées
    pour en faire une évaluation.

    Actuellement, parlant de justice, nous devons poser le problème non
    seulement en termes de culpabilité mais aussi en responsabilité. Les
    questions relatives à la culpabilité sont intimement liées à la
    mémoire vivante. S'agissant de l'occupation de la Finlande par la
    Russie en 1809 ou de l'occupation par Israël de la Cisjordanie ou du
    Génocide arménien, ils appartiennent tous au même univers moral.

    L'aspect impartialité n'est peut-être pas le seul à prendre en compte,
    mais il est le plus pertinent.

    Je ne dis pas que l'historien devrait toujours relever qui est
    coupable et qui est innocent, les auteurs et les victimes ; cependant
    l'historien a la responsabilité de toujours présenter un jugement
    impartial basé sur les faits pertinents de chaque cas.

    Le savoir pour le savoir n'existe pas. Les historiens devraient porter
    la complexité de l'histoire dans la lumière. Mais ils devraient
    cependant le faire, pas seulement pour mettre la vérité en lumière,
    mais aussi pour développer la mémoire collective et le sentiment de
    l'histoire.

    Peut-être Martin Wiklund peut-il nous indiquer la solution - au
    Danemark et en Suède, et ce qui est encore plus important, en Turquie.

    Suzanne Khardalian


    Suzanne Khardalian est auteur de films documentaires basée à
    Stockholm, Suède. Ses films sont ` Back to Ararat `, ` I Hate Dogs `
    et ` Grandma's Tattoos ` [ retour à Ararat, je hais les chiens, les
    tatouages de grand-mère ]. Elle contribue régulièrement aux journaux
    de langue arménienne.

    The Armenian Weekly

    Traduction Gilbert béguian

    samedi 5 janvier 2013,
    Stéphane ©armenews.com

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