Announcement

Collapse
No announcement yet.

Soudan : La Lettre Ouverte Des Jeunes Militants De Girifna

Collapse
X
 
  • Filter
  • Time
  • Show
Clear All
new posts

  • Soudan : La Lettre Ouverte Des Jeunes Militants De Girifna

    SOUDAN : LA LETTRE OUVERTE DES JEUNES MILITANTS DE GIRIFNA

    http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=71555
    Publié le : 22-02-2013

    Info Collectif VAN - www.collectifvan.org - Le Collectif VAN vous
    presente la lettre ouverte des jeunes militants de Girifna, s'adressant
    a l'expert independant des Nations Unies, publiee sur le site d'Amnesty
    International le 19 fevrier 2013.

    Legende photo: Les membres de Girifna, etudiants pour la plupart,
    militent pour la democratie et le respect des droits humains © Peter
    Steudtne

    Amnesty International

    Soudan : les jeunes militants de Girifna prennent la parole

    [19/02/2013]

    Depuis 2009, les jeunes militants de Girifna denoncent les restrictions
    permanentes a la liberte d'expression et reclament un changement
    democratique. Harceles, cibles de violences physiques et d'arrestations
    arbitraires, ils persistent. A l'occasion de la visite dans le pays
    en fevrier 2013 de l'expert independant des Nations Unies sur la
    situation des droits humains au Soudan, ils lui ont adresse une lettre
    ouverte. Dans ce message très crû, ils rappellent les menaces qui
    pèsent sur tous ceux qui osent elever une voix critique dans le pays.

    Les jeunes militants de Girifna s'adressent a l'expert independant
    des Nations Unies dans une lettre ouverte. Ils rappellent la realite
    des menaces qui pèsent sur eux et sur tous ceux qui osent elever une
    voix critique dans le pays.

    "Monsieur Baderin,

    Nous avons decide de vous ecrire en apprenant que vous veniez au
    Soudan enqueter sur la situation des droits humains. Nous savons
    pertinemment que vous ne pourrez pas nous rencontrer et de fait, meme
    si vous nous le proposiez, nous ne pourrions accepter, pour notre
    propre securite. Nous souhaiterions tout d'abord vous remercier de
    venir au Soudan, et nous esperons que votre sejour sera productif.

    Ensuite, nous voudrions vous raconter notre histoire, l'histoire d'un
    peuple, pas simplement d'un mouvement.

    En juin dernier, trente membres du Service national de la sûrete et
    du renseignement (NISS) ont fait une descente chez une militante,
    qui a alors cru mourir executee. Ils ont enfonce la porte de la salle
    de bains, ont fait irruption dans sa chambre, l'ont agrippee par
    le bras et ont terrorise sa famille. Sa mère, extremement choquee,
    les a supplies jusqu'a ce qu'ils la laissent accompagner sa fille.

    Une scène est restee gravee dans la memoire de la militante : sa
    mère la serrant dans ses bras et demandant aux agents du NISS de
    la tuer a sa place. La mère a pu rentrer chez elle, mais la jeune
    femme a ete gardee en detention pendant près de deux mois, sans
    aucun procès. Elle a subi des violences psychologiques, de longues
    seances d'interrogatoire et a vecu dans des conditions de detention
    inhumaines. Elle a implore pour avoir les serviettes hygieniques
    indispensables a une femme de son âge. Chaque soir, elle se couchait
    la faim au ventre et sa famille lui manquait terriblement.

    Un membre de GIRIFNA a pu s'enfuir avec l'aide de sa famille lors
    d'une rafle du NISS, qui a alors arrete son frère et deux oncles pour
    l'obliger a se rendre.

    Il est reste en cavale plusieurs semaines avant de quitter le pays,
    mais son frère a ete detenu pendant plusieurs semaines et a subi
    des tortures physiques et psychologiques. Sa famille a ete harcelee,
    menacee, et a subi d'autres descentes.

    Un autre militant d'une vingtaine d'annee a ete place a l'isolement
    pendant deux mois sans procès ni accès a un juge. Il a declare preferer
    etre execute ou rester emprisonne 10 ans en compagnie d'autres detenus,
    tout plutôt que l'isolement.

    Jalila Khamis, 45 ans, enseignante et mère de six enfants, milite pour
    les droits des femmes noubas. Elle a ete detenue neuf mois avant de
    pouvoir etre presentee a un juge ou traduite en justice. Son crime
    etait de s'etre elevee publiquement contre les atrocites commises
    par l'Etat envers les populations civiles des montagnes de Nouba.

    Au Soudan, vouloir denoncer les violations des droits humains commises
    par le gouvernement vous expose a des graves dangers. Si vous n'etes
    pas place en detention, les forces de securites veilleront a ce
    que vous perdiez tout moyen de subsistance. En consequence, les
    journalistes qui se sont fermement eleves contre l'oppression et le
    manque de libertes civiles sont harceles ou interdits de publication
    dans tous les journaux. Leur nombre continue d'augmenter, et meme
    les journalistes citoyens ne sont pas epargnes.

    S'il ne vous arrete pas, le NISS fait une descente chez vous. De
    nombreux militants ont ainsi perdu argent, telephones et ordinateurs
    portables, or et objets de valeur, saisis lors de ces descentes. Si
    vous n'etes pas soumis a un interrogatoire, alors vous serez viole
    et torture. Nous avons recense des cas de viol et de torture subis
    par des militants des deux sexes.

    L'un d'entre eux a ete menace de castration. On lui a montre un morceau
    de tissu sanglant et dit que celui-ci renfermait un organe masculin
    coupe. On a de la peine a se croire au 21ème siècle, et non dans la
    Russie de Staline ou l'Allemagne hitlerienne.

    GIRIFNA a recense une tentative de suicide en detention au cours
    de l'annee passee, ce qui montre a quel point les conditions
    d'incarceration sont mauvaises.

    Des centaines de milliers de personnes sont mortes depuis l'arrivee
    au pouvoir du gouvernement actuel. Il guerroie dans le sud du pays et
    combat en ce moment les rebelles au Darfour et dans les Etats du Nil
    Bleu et du Kordofan meridional. Au Soudan, le peuple se retrouve pris
    entre deux feux, les femmes sont violees par l'armee soudanaise et les
    hommes executes de sang-froid. Le gouvernement insiste sur le chiffre
    de 10 000 morts au Darfour, cependant il semble que tous les habitants
    de la region ont perdu un proche lors de cette decennie de conflit.

    Dans le Kordofan meridional, notre peuple est affame et se cache dans
    des grottes, pensant ainsi se proteger des bombardements aeriens de
    leur propre gouvernement, mais en vain.

    Monsieur Baderin, nous savons que vous etes ici pour rencontrer des
    membres de la societe civile, mais nous voulons vous dire que la
    societe civile soudanaise est regulièrement opprimee. En novembre
    et decembre 2012, cinq organisations de la societe civile accusees
    d'espionnage ont ete dissoutes. Nous pouvons affirmer encore une fois
    qu'elles ne s'occupaient, entre autres, que d'activites culturelles,
    de formations et de collecte d'informations sur les droits humains.

    Elles tentaient de doter le peuple du Soudan d'une voix qui resonnerait
    dans le monde entier.

    D'autres organisations sont la cible d'intimidations et de nombreux
    membres de la societe civile ont quitte le Soudan pour echapper aux
    pressions constantes du NISS. Nous avons donc decide de vous ecrire,
    en esperant avoir ainsi la chance de vous raconter l'histoire de
    notre pays.

    Nous sommes epuises, M. Baderin, nous avons subi tant d'atrocites,
    mais nous nous obstinons a dire la verite.

    Nous esperons que vous nous aurez entendus.

    Merci.

    GIRIFNA"

    Retour a la rubrique

    Source/Lien : Amnesty International


    From: Baghdasarian
Working...
X