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Pinar Selek : Le Cauchemar Turc Depuis 1998

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  • Pinar Selek : Le Cauchemar Turc Depuis 1998

    PINAR SELEK : LE CAUCHEMAR TURC DEPUIS 1998

    http://www.collectifvan.org/article.php?r=0&id=75939
    Publie le : 03-10-2013

    Info Collectif VAN -www.collectifvan.org - Depuis 1998, le pouvoir turc
    impose un veritable cauchemar a une sociologue et auteur, Pinar Selek,
    condamnee a la perpetuite sous de fausses accusations. La jeune femme
    vit en exil a Strasbourg et compte, pour rompre le cercle infernal des
    poursuites judiciaires, sur le soutien de tous ceux qui sont attaches a
    la defense des droits de l'homme (voir sur ce lien, la Campagne lancee
    en septembre 2013 par son Comite de soutien). Le Collectif VAN vous
    propose ici le texte detaille des etapes juridiques des divers procès
    subis depuis 15 ans, prepare par la plate-forme "Nous sommes toujours
    temoins", mis en ligne sur le site du Comite de Soutien a Pinar Selek.

    Pinar Selek

    Le cauchemar est dans sa 15ème annee

    Depuis près de quinze ans on impose un cauchemar a Pinar Selek,
    a sa famille et a tous ceux qui attendent que justice soit rendue.

    Cette affaire, veritable deni de justice qu'il n'est plus possible
    de considerer comme une erreur judiciaire, est donc entree dans sa
    quinzième annee.

    Pinar Selek a ete choisie comme cible a l'epoque où elle menait des
    recherches sur la question kurde, en 1997. À cette epoque, dans un
    contexte difficile, elle effectuait un travail courageux et dangereux
    puisqu'elle interviewait les differentes parties du conflit opposant
    l'Etat turc aux Kurdes, pour relater les conditions de cette guerre
    et comprendre ce qui faisait obstacle a un accord de paix. En ce
    temps-la, tous les " memorandums " officiels alors publies sur la
    guerre etaient faux, comme l'ont reconnu par la suite ceux qui les
    redigeaient, et les chars roulaient dans les rues de la capitale,
    Ankara, pour " peaufiner " le travail. L'Etat etait determine a "
    resoudre " le problème kurde par les armes et la repression.

    C'est dans ce contexte que Pinar Selek a ete placee en garde a vue par
    la police le 11 juillet 1998. Ses recherches ont ete confisquees et on
    l'a brutalement torturee parce qu'elle refusait de donner les noms des
    personnes qu'elle avait interviewees. Les rapports officiels concernant
    sa detention sont truffes de mensonges. Ainsi, au cours d'une de ces
    seances elle a eu le bras gauche deboîte, mais un document de la police
    ajoute au dossier explique ses lesions par une chute spontanee sur le
    bras. Et quand la police a exige une prolongation de sa detention,
    on lui a refuse la possibilite de rencontrer d'autre fonctionnaire
    que des policiers.

    D'autres rapports indiquent que des explosifs et du materiel suspect,
    qui appartenaient en fait a d'autres et ont ete detruits avant meme
    sa garde a vue, ont ete trouves dans l'atelier de rue que Pinar
    Selek avait cofonde (un atelier cree avec les enfants des rues et les
    personnes marginalisees). Or la date et le numero du rapport d'enquete
    realise sur les lieux de l'explosion permettent de demontrer que ces
    fameux explosifs, pretendument recuperes dans l'atelier, etaient entre
    les mains de la police 22 heures avant la perquisition de l'atelier
    et 13 heures avant la garde a vue de Pinar, et ce dans le but de les
    detruire. La police l'a egalement accusee d'avoir cache un militant
    d'une organisation terroriste dans l'atelier pendant plusieurs jours.

    Pourtant, le rapport de police relatif a la surveillance exercee sur
    l'atelier et sur Pinar elle-meme avant son interpellation ne mentionne
    nulle part la presence d'un membre d'une telle organisation. Aucune des
    personnes en lien avec l'atelier n'a d'ailleurs jamais ete interrogee
    a ce sujet, pas meme le proprietaire des lieux. Le mandat d'arret
    emis par le juge militaire de la Cour de sûrete de l'Etat concernait
    uniquement Pinar Selek.

    Autour de 1998, dans un contexte marque par une succession de "
    complots " et la publication en cascade de notes officielles, Pinar
    Selek a ete choisie pour en faire un exemple : son cas devait intimider
    tous les intellectuels et les chercheurs qui oseraient s'interesser
    serieusement a la question kurde. La decision de Pinar Selek de ne
    pas abandonner et de poursuivre au contraire son travail pour la
    paix, son engagement dans le mouvement des femmes et la recherche
    universitaire ont attise l'acharnement a son egard - un acharnement
    qui s'est manifeste par des menaces, des agressions et l'allongement
    de la procedure judiciaire.

    LE DEROULEMENT DE L'AFFAIRE

    Pinar Selek a d'abord ete inculpee d' " appartenance a une
    organisation illegale ". Puis, alors qu'elle etait incarceree a la
    prison d'Umraniye elle a appris en regardant la television qu'elle
    etait inculpee d'avoir participe a un pretendu attentat perpetre un
    mois et demi plus tôt au marche aux epices d'Istanbul. Le complot
    contre Pinar Selek s'amplifiait progressivement.

    Cela faisait longtemps que les deplacements de Pinar Selek etaient
    surveilles par la police quand elle a ete placee en garde a vue le 11
    juillet 19 98, deux jours seulement après l'explosion du marche aux
    epices. On ne lui a pourtant pose aucune question a ce sujet, lors de
    l'enquete d'envergure qui a immediatement suivi le drame. Ces elements
    revèlent clairement la machination a laquelle a affaire Pinar Selek.

    Les rapports d'enquete sur les lieux de l'explosion et les rapports
    d'experts du laboratoire de la police criminelle dates des 13 et
    14 juillet 1998, soit juste après l'explosion, indiquent qu'au vu
    des indices recueillis sur place l'explosion n'etait pas de nature
    criminelle.

    Le rapport final de la police criminelle, date du 20 juillet 1998,
    confirme lui aussi que rien ne permet de conclure a la presence
    d'une bombe.

    L'accusation ne reposait que sur le temoignage d'Abdulmecit Ozturk,
    qui, d'après la police, avait reconnu avoir pose une bombe dans le
    marche aux epices avec Pinar Selek. Ce nouveau chef d'inculpation a
    par la suite ete ajoute a celui d' " appartenance a une organisation
    illegale ".

    À l'audience du 22 decembre 1998 où Pinar Selek et Abdulmecit Ozturk
    ont comparu pour l'explosion du marche aux epices, Abdulmecit Ozturk
    a affirme que ses aveux lui avaient ete arraches sous la torture et
    qu'en realite il ne connaissait pas Pinar Selek.

    À l'audience du 5 juillet 1999, l'inspecteur en chef charge de
    l'enquete sur les lieux de l'explosion, par ailleurs chef du bureau
    de deminage de la police, a declare : " Nous n'avons trouve aucune
    trace de bombe. Une fuite de gaz en bouteille peut diffuser sur le
    sol et provoquer ce genre d'explosion. S'il s'etait agi d'une bombe,
    elle aurait creuse un cratère d'au moins 50 cm a l'endroit où elle
    a explose. Nous n'avons rien observe de tel lors de notre examen des
    lieux. "

    Dans son rapport en date du 15 juin 2000, Resat Apak, directeur
    du departement de chimie analytique de l'Universite d'Istanbul,
    souligne que " le rapport du procureur n'est pas scientifique et il est
    susceptible d'induire la Cour en erreur. On trouve de la nitrocellulose
    dans differents materiaux, cela ne suffit pas a prouver qu'il y a eu
    une bombe. "

    Le rapport du 27 juillet 2000 du departement de medecine legale de
    la faculte de medecine de Cerrahpasa affirme egalement que le rapport
    du procureur n'est pas scientifique et explique qu'" aucun des faits
    observes ne concorde avec ceux habituellement provoques par l'explosion
    d'une bombe. "

    Enfin, le 21 decembre 2000, les rapports des trois professeurs experts
    nommes par le tribunal ont confirme que l'explosion avait ete causee
    par une fuite de gaz et non par une bombe.

    Après deux ans et demi d'emprisonnement, le 22 decembre 2000, le
    tribunal a enfin libere Pinar Selek.

    À la suite de cette decision, le Ministre de l'interieur et le
    directeur des services de police d'Istanbul de l'epoque ont envoye
    a la cour une lettre en date du 19 avril 2001, indiquant que cette
    liberation les inquietait au plus haut point. Alors que l'explosion
    avait eu lieu depuis près de trois ans, ces hauts responsables qui
    n'etaient pas partie prenante de l'affaire ont fait ajouter au dossier
    un nouveau rapport. Ce document que la cour n'avait pas sollicite et
    qui n'est ni date ni signe affirme que " l'explosion a ete causee par
    une bombe ". Ses commanditaires demandaient par consequent a la cour de
    renvoyer a nouveau l'affaire devant les experts. Meme si le tribunal
    n'a pas considere que le rapport constituait une preuve a charge,
    il s'est cependant plie a ces nouvelles exigences en transmettant de
    nouveau le dossier aux experts. À ce stade, l'independance judiciaire
    etait ouvertement remise en cause.

    Il est par ailleurs apparu que le rapport du 4 juillet 2002, prepare
    par des membres de la gendarmerie sans aucune expertise dans la
    determination de l'origine d'une explosion (et qui contredisait les
    avis des experts), etait en fait une copie du rapport sans signature
    ni date que la police avait glisse dans le dossier.

    Le rapport de l'expert designe par le tribunal le 10 juillet 2002 a
    toutefois confirme que l'explosion etait due a une fuite de gaz, et
    le rapport final date du 21 novembre 2002, etabli par le departement
    d'ingenierie electrique et electronique de l'Universite technique
    du Moyen-Orient a l'aide d'une technologie de traitement visuel des
    donnees, indique que l'explosion semble bien avoir ete provoquee par
    une fuite de gaz. Selon son auteur, le " rapport de la gendarmerie "
    ne tient pas compte des lois de la physique et l'explosion a eu lieu
    dans un four.

    Le 8 juin 2006, la 12e Cour penale d'Istanbul a rendu sa première
    decision et prononce l'acquittement de Pinar Selek et d'Abdulmecit
    Ozturk, en soulignant que, s'agissant de l'explosion du marche aux
    epices, il n'y avait " aucune preuve certaine et credible sur laquelle
    fonder une condamnation. " Cette decision a ete infirmee le 17 avril
    2007 par la 9e Chambre penale de la Cour de cassation, au motif qu'"
    aucun verdict n'a ete rendu. "

    Pinar Selek a donc ete jugee une fois de plus, et le 23 mai 2008,
    la 12e Cour penale d'Istanbul a reitere sa decision precedente en
    prononcant a nouveau l'acquittement pour les charges retenues dans
    l'explosion du marche aux epices.

    Quant aux accusations de complicite, la 12e Cour a decide de " classer
    l'affaire en raison de la prescription. " Dans son verdict, elle estime
    en outre que les accusations qui font etat de l'appartenance de Pinar
    Selek a une organisation terroriste ne sont pas credibles. Pinar
    Selek a donc ete acquittee pour la deuxième fois.

    Durant toutes ces annees, le temoignage d'Abdulmecit Ozturk,
    extorque sous la torture par la police et sans l'assistance d'un
    avocat, temoignage qu'il renia plus tard, est reste le seul element
    qui reliait directement Pinar a l'accusation concernant l'explosion
    du marche aux epices. De surcroît, l'acquittement d'Ozturk a ete
    confirme puisque le ministère public n'a jamais fait appel de la
    decision rendue a son egard.

    Le procureur a accuse Pinar Selek sur la seule foi de la confession
    d'Ozturk, et alors qu'il acceptait l'acquittement de ce dernier il
    a fait appel de l'acquittement de Pinar Selek !

    Ce qui s'est passe alors est inimaginable : en effet, tandis que
    le temoignage d'Ozturk (recueilli sous la torture et dans lequel
    il disait avoir agi avec Pinar Selek) etait juge irrecevable et non
    probant quant a la culpabilite d'Ozturk lui-meme, il etait retenu a
    charge contre Pinar. La decision du ministère public de faire appel
    de l'acquittement de Pinar Selek montre une nouvelle fois qu'elle a
    ete choisie pour cible.

    Le 10 mars 2009, la 9e Chambre penale de la Cour de cassation a requis
    contre Pinar Selek une peine de reclusion a perpetuite en se fondant
    uniquement sur le temoignage d'Ozturk et le rapport de la gendarmerie
    dont les experts avaient pourtant declare qu'il meconnaissait les
    lois de la physique. C'est sur ces bases que la 9e Chambre a infirme
    la decision de la 12e Cour penale d'Istanbul, en meme temps qu'elle
    confirmait le verdict d'acquittement d'Ozturk.

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    Lire aussi :

    Soutenir Pinar Selek contre la "democrature" turque

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    Source/Lien : Pinar Selek

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