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Le dernier carré des chrétiens de Turquie rêve de jours meilleurs

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    TURQUIE
    Le dernier carré des chrétiens de Turquie rêve de jours meilleurs


    Mardin (Turquie) - Un petit village perdu dans le sud-est de la
    Turquie, où les ruines se mêlent aux maisons neuves. Au bout d'une
    route, deux églises. L'une millénaire, l'autre moderne, témoins du
    passé chrétien de la région et de la volonté de ses habitants de le
    ressusciter.

    Seyde Bozdemir est née et a été baptisée dans ce hameau d'Elbegendi
    --Kafro dans sa langue syriaque--, au sud de Midyat. Comme nombre de ses
    habitants, elle a un jour pris le chemin de l'exil, direction
    l'Allemagne. Aujourd'hui, elle est résolue à y revenir.

    "Ici, c'est chez nous. C'est ici que l'on veut finir notre vie et être
    enterrés", dit Seyde, de confession chrétienne syriaque.

    "Dans les années 1980, on a tout laissé et on a pris la fuite sans se
    retourner. C'était devenu très difficile, invivable même",
    poursuit-elle, "mais quand on rêve, on rêve encore d'ici. C'est pour
    ça qu'on veut rentrer chez nous".des chré

    Le "muhtar" (maire) d'Elbegendi a déjà accompli ce chemin. Après
    vingt-trois ans en Suisse, Aziz Demir a regagné la terre de son
    enfance. Il se souvient encore des années de plomb du conflit kurde,
    qui ont fait de sa bourgade un village fantôme.

    "C'était la guerre entre les rebelles kurdes du PKK (Parti des
    travailleurs du Kurdistan) et l'armée. Le jour, l'armée était dans les
    rues, la nuit c'était le PKK", raconte Aziz Demir.

    "Pendant cette période, 50 à 60 Chrétiens ont été assassinés dans la
    région. On voulait rester neutre, mais ce n'était pas possible. Alors
    on est parti", regrette-t-il. "Mais maintenant, on veut revenir. Pour
    protéger notre religion, notre culture".

    Comme lui, une poignée d'habitants ont fait ce retour aux sources. Ces
    dernières années, 17 imposantes maisons sont sorties de terre à
    Elbegendi pour accueillir les familles de ceux qui reviennent. Et
    d'autres sont prêts à les rejoindre, si les pourparlers de paix en
    cours entre Ankara et le PKK se concrétisent.

    Mort à petit feu -

    Amorcé avec les échanges de populations à l'indépendance turque en
    1923, le grand exil des chrétiens de Turquie s'est accéléré à la
    faveur des émeutes intercommunautaires des années 1950, de l'invasion
    de Chypre-Nord (1974) et des crises économiques. Massif, il a réduit
    leur communauté à la portion congrue.

    Dans cette plaine de la Haute-Mésopotamie où ils ont fait leurs
    premiers pas hors de Jérusalem comme dans le reste du pays, ils ne
    sont plus que 80.000. Des orthodoxes surtout, Arméniens ou Syriaques,
    et une poignée de catholiques, chaldéens ou autres. Une goutte d'eau
    dans un océan de 75 millions de musulmans.

    Adnan Saglamoglu est l'un de ces rescapés. De confession chaldéenne,
    ce bijoutier a fait le choix de rester à Mardin (sud-est) où, il
    l'avoue, il se sent parfois un peu seul.

    "Nous ne sommes plus que quatre familles", confie-t-il.

    S'il avoue sentir la tension monter "dès lors qu'il arrive quelque
    chose à un musulman", M. Saglamoglu ne se sent pas menacé et assure
    pouvoir vivre sa foi sans crainte.

    Quatre ans après l'assassinat du chef de l'Eglise catholique en
    Turquie, il redoute bien plus la mort à petit feu de sa communauté.
    "Sans l'aide de ceux qui sont à l'étranger, nous aurions déjà disparu.
    Mais nous essayons de faire vivre notre culture", assure-t-il en
    ouvrant fièrement la porte de sa petite église de centre-ville.

    Quelques ptés de maisons plus loin, l'église syriaque dite des
    "quarante martyrs", construite aux IIIe et IVe siècles, affiche elle
    aussi, fière allure. Comme les dix autres encore debout à Mardin, elle
    a été entièrement et fraîchement remise à neuf, pour près d'un million
    de livres turques (350.000 euros).

    "Citoyens à part entière" -

    "Nous survivons grce à l'argent récolté dans notre communauté, nous
    ne recevons aucune aide de l'Etat turc, ni de fonds européens",
    explique son prêtre, Gabriel Aktas.

    Plus que de son budget, il s'inquiète de l'état de son "troupeau".
    "Comme nous n'avons plus assez de fidèles ni de prêtres, nous
    organisons chaque dimanche la messe dans une église différente",
    dit-il, "et puis nous proposons un enseignement religieux. Ce n'est
    pas officiel mais les autorités turques laissent faire".

    Le gouvernement islamo-conservateur au pouvoir depuis 2002 en Turquie
    se pose volontiers en défenseur de "toutes les religions". Mais les
    communautés chrétiennes du pays ne sont toujours pas considérées
    juridiquement comme des minorités.

    Cette reconnaissance figure en tête des revendications des chrétiens
    de Turquie, eux aussi victimes des massacres qui ont visé les
    Arméniens sous l'Empire ottoman en 1915.

    "Aujourd'hui, on ne peut toujours pas construire d'église en Turquie,
    c'est une honte", fulmine Ayhan Gürkan, qui donne des cours de
    catéchisme, non officiels, dans le secret d'une petite église syriaque
    de Midyat.

    "Nous voulons pouvoir enseigner dans notre langue maternelle (...) que
    tous les biens, terres, églises, monastères qui nous ont été
    confisqués nous soient rendus", poursuit-il, "nous voulons être des
    citoyens à part entière".

    Dans ce combat, Aziz Demir attend l'aide du pape François, qui visite
    la Turquie à la fin de la semaine. "Nous ne voulons plus que l'Europe
    sacrifie les Chrétiens d'Orient", lance-t-il, "il faut qu'ils puissent
    enfin vivre sur leurs terres".

    AFP

    dimanche 30 novembre 2014,
    Stéphane (c)armenews.com
    http://www.armenews.com/article.php3?id_article=105658

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