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AZTAG: Interview de Hilmar Kaiser

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    "Aztag" Daily Newspaper
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    Beirut, Lebanon
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    Phone: +961 1 260115, +961 1 241274
    Email: [email protected]


    Interview de Hilmar Kaiser
    Par Khatchig Mouradian
    Jeudi 22 septembre 2005
    http://www.aztagdaily.com/interviews/Interviews.htm

    Traduction Louise Kiffer

    Ces dernières années, le Gouvernement turc a constamment répété que les
    archives ottomanes étaient grand ouvertes aux chercheurs qui étudient le
    génocide de 1915. Ainsi, récemment, le 16 septembre 2005, le Premier
    Ministre de Turquie, Recep Tayyip Erdogan a dit, en réponse à une question
    au sujet de la résolution adoptée récemment par le Comité des Relations
    Internationales de la Chambre des Représentants US: "Nous disons clairement
    que les archives de la Turquie sont ouvertes, et l'Arménie devrait ouvrir
    les siennes si elle en a. Nous parlerons sur la base des documents et de
    l'information. Je ne comprends pas sur quelles bases des pays sans aucun
    lien peuvent prendre des décisions sur le soi-disant génocide arménien. Ces
    décisions sont toutes de nature politique et ne servent pas la paix du
    monde.

    Pour découvrir jusqu'à quel point les archives ottomanes sont ouvertes,
    pour le moment, j'ai parlé récemment à Hilmar Kaiser, un historient à qui il
    a été interdit en 1996, de consulter les archives, mais y a été de nouveau
    autorisé en juillet 2005 et a eu accès aux documents d'archives qui lui
    avaient été refusés dix ans auparavant. Comme le révèle constamment
    l'interview, les affirmations que les archives ottomanes sont ouvertes sont
    partiellement vraies, la plupart.

    Hilmar Kaiser a reçu son PhD (doctorat de philosophie) de l'Institut
    Universitaire Européen de Florence. Il s'est spécialisé dans l'Histoire
    Sociale et Economique ottomane, de même que dans le Génocide arménien. Il a
    fait des recherches dans plus de 60 archives dans le monde, y compris les
    archives ottomanes d'Istanbul. Il a publié des ouvrages - des monographies,
    des livres et des articles - comprenant: "Imperialism, Racism, and
    Development Theories: The Construction of a Dominant Paradigm on Ottoman
    Armenians" (Théories sur l'Impérialisme, le racisme et le Développement:
    Construction d'un paradigme dominant sur les Arméniens ottomans")
    "At the Crossroads of Der-Zor : Death Survival and Humanitarian Resistance
    in Aleppo, 1915-1917" (A la Croisée des Chemins de Der-Zor: la survie et la
    résistance humanitaire à Alep 1915-1917) "The Bagdad Railway and the
    Armenian Genocide, 1915-1916 - A Case Study in German Resistance and
    complicity" (Le Chemin de fer de Bagdad et le Génocide arménien, 1915-1916:
    Une étude de cas sur la Résistance et la Complicité allemande)
    "1915-1916 Ermeni Soykirimi Sirasinda Ermeni Mulkleri, Osmanli
    Hukuku ve Milliyet Politikalari";
    "Le Génocide arménien: négation à l'allemande"
    et From Empire to Republic: The Continuities for Turkish Denial" (de
    l'Empire à la République: la persistance du déni turc).

    Khatchig Mouradian - En juillet 2005, presque dix ans après avoir été banni
    des Archives d''Etat ottomanes, on vous a de nouveau donné accès aux
    archives. Comment y êtes-vous entré ?

    Hilmar Kaiser - Je suis arrivé à Istanbul un dimanche. J'ai été aux archives
    le lendemain matin. A l'entrée, ils m'ont demandé si j'avais une carte de
    lecteur, j'ai dit "non". On m'a dit d'aller au bureau d'inscription, et de
    remplir le formulaire habituel de demande. Ils ont numérisé les données qui
    étaient sur mon passeport, quand il ont fini d'enregistrer, ils m'ont
    demandé si j'avais été aux archives auparavant, car ils ont vu qu'il y avait
    une entrée; j'ai confirmé. Puis ils m'ont établi une nouvelle carte de
    lecteur. Quelques minutes plus tard, j'étais dans la salle de lecture, avec
    les catalogues et les documents.

    C'était exactement la même procédure que dans toutes les autres archives où
    j'avais travaillé.

    K.M. - Certains intellectuels ayant travaillé aux Archives d'Etat ottomanes
    se sont constamment plaints que les documents qu'ils demandaient étaient au
    préalable "épurés" par une commission de contrôle, et leur étaient remis
    ensuite. Avez-vous eu ce même problème ?

    H.K. - Au début des années 90, quand j'y étais, il existait une soi-disant
    commission de contrôle, non officielle, non reconnue et même déniée, qui
    lisait tout ce que je recevais. Je n'ai aucune preuve qu'il en ait été ainsi
    cette fois-ci.

    K.M. - Les médias, spécialement les sources d'informations turques et
    arméniennes parlent souvent d'archives ottomanes ouvertes ou fermées.
    Mais ce qui est entendu par archives ottomanes est rarement expliqué.
    Pouvez-vous nous éclairer un peu sur cette question ?

    H.K. Les archives ottomanes sont une abréviation de: "Les Archives ottomanes
    du Premier Ministre turc" qui se trouvent à Istanbul. Les archives
    nationales turques (devlet arshivleri) ont deux branches principales: les
    archives ottomanes (jusqu'en 1923) et les archives républicaines (après
    1923) , mais naturellement il y a un chevauchement.

    K.M. Qu'en est-il des archives militaires ?

    H.K. Il y a les archives militaires qui dépendent d'une institution du
    personnel général.

    K.M. Et ces archives ne sont pas ouvertes, n'est-ce pas ?

    H.K. Je ne sais pas. J'ai fait une demande un jour en 1991, et je n'ai pas
    été autorisé, mon expérience est donc limitée aux archives ottomanes, comme
    je l'ai déjà dit. Pas aux archives républicaines, ni aux archives
    militaires.

    K.M. Et en ce qui concerne les archives du Comité Union et Progrès (CUP)?

    H.K. Je ne pense pas que les archives du CUP aient jamais été cataloguées
    quelque part en tant que telles.

    K.M. Ont-elles été détruites ?

    H.K. J'en doute. Je ne sais pas. Nous devons faire très attention à ne pas
    mélanger les informations. Tout ce qui concerne les archives du CUP n'est
    que pure spéculation. Nous n'avons aucune indication comme quoi elles
    auraient été détruites.

    K.M. Pouvez-vous aisément dire que les archives ottomanes sont ouvertes ?

    H.K. Je peux me rendre aux archives. Je peux voir les catalogues et obtenir
    les documents qui sont dans les catalogues. Je n'obtiens pas les documents
    qui ne sont pas catalogués; cela n'a rien de spécial. Dans tous les services
    d'archives, il y a un processus constant de mise à jour des catalogues,
    aussi longtemps que les archives reçoivent des nouveaux matériaux, on les
    classe aussi dans des dossiers. Pourtant , je sais que des collections
    importantes des Archives ottomanes du Premier Ministre ont été cataloguées,
    mais ces catalogues ne figurent pas dans la salle de lecture. Il y a donc
    des matériaux qui ont été classés et catalogués, mais qui restent cachés.
    L'une de ces collections est la collection arménienne de la Direction
    Ottomane de la Sécurité Publique (2ème Division), qui est une subdivision du
    Ministère de l'Intérieur.

    Ce qui est disponible, par exemple ce sont les dossiers du Bureau du Chiffre
    du Ministère de l'Intérieur Ottoman, qui contiennent un grand nombre
    d'ordres de déportation et autres ordres, relatifs à la déportation des
    Arméniens. Par exemple, des instructions concernant la déportation de Zohrab
    et Vartkès Effendi, et des instructions concernant des membres individuels
    de la FRA (Fédération Révolutionnaire Arménienne). Cependant, les réponses à
    ces ordres sont, autant que je sache, retenues dans la 2ème Division (voir
    ci-dessus) du Ministère de l'Intérieur, et ces documents ne sont pas à notre
    disposition. Nous savons donc qu'il y a eu des instructions, mais nous
    n'avons pas les réponses. D'autres ordres se trouvent au Ministère des
    Archives Militaires. Pour avoir un tableau de l'ensemble, il nous faut la
    Direction du Chiffre, la 2ème Division, plus les Archives militaires. Voilà
    ce que nous savons maintenant. Selon certaines sources, il y a d'autres
    collections dans ces archives, qui ne sont pas encore disponibles, et sont
    très importantes, mais étant donné que je n'ai aucune information imprimée à
    ce sujet, je ne peux rien dire.
    Nous voulons maintenant avoir accès à ces documents qui ont été catalogués
    mais ne sont pas disponibles. Pour mettre cela dans une perspective
    politique,
    le Premier Ministre Tayyip Erdogan a dit que les archives étaient ouvertes.
    Oui, elles sont ouvertes, c'est vrai, mais ce qui est impliqué dans cette
    déclaration, soi-disant qu'on peut voir tout ce qu'ils ont, ne colle pas.
    J'espère que d'autres documents vont également être rendus disponibles. Le
    gouvernement turc est maintenant sur une excellente voie..

    K.M. Prenant en considération la politique de déni du gouvernement turc,
    est-il réaliste d'espérer que certains documents qui pourraient éclairer les
    aspects "sensibles" du génocide arménien, seront rendus disponibles ?

    H.K. Je ne peux pas faire de commentaire sur des documents que je n'ai pas
    vus. Certaines personnes me demandent s'il y a des documents qui ont été
    épurés. Cela voudrait dire qu'il y a des matériaux que j'ai vus auparavant,
    mais qu'ils ont disparu. Ce que je peux dire est ceci: j'ai été là-bas;
    j'ai obtenu les matériaux qui m'avaient constamment été refusés il y a dix
    ans. C'est donc là un grand pas en avant. Je peux aussi dire qu'avant,
    j'avais du mal à obtenir des photocopies. Il y avait un dossier de 54 pages,
    on m'en rendait 36, les 18 autres pages avaient disparu dans l'opération.
    Cette fois-ci, j'ai eu mes photocopies très rapidement, et je n'avais pas la
    moindre raison de me plaindre, ils ont fait un vrai travail de
    professionnel. Il est évident que le gouvernement turc a suffisamment de
    contrôle sur les archives pour renforcer sa volonté politique sur
    l'administration, ce qui est très important, si nous gardons à l'esprit que
    le gouvernement turc représente le mouvement politique qui a été dans
    l'opposition pendant des dizaines d'années, et maintenant pour la première
    fois, il est au pouvoir.

    Je ne m'attends pas à ce que M. Erdogan examine tous ces documents dans les
    archives, c'est une opération sur laquelle il faut attirer son attention, et
    les choses vont s'améliorer, sans aucun doute. Vont-ils rendre disponibles
    des matériaux qui vont endommager leur position ? Je pense que la position
    turque est en train d'évoluer maintenant; j'ai parlé à des gens qui
    admettaient qu'il y ait eu des massacres d'Arméniens, avec la participation
    d'ordres par des fonctionnaires du gouvernement, mais pas des dirigeants du
    gouvernement central. Ainsi la position a-t-elle évolué, avec la
    reconnaissance de la participation des autorités locales et provinciales,
    mais aussi la certitude que le gouvernement central n'était pas d'accord
    avec ces autorités. Cela rend leur position plus défendable, cela veut dire
    que les positions turques et arméniennes se rapprochent, cela veut dire
    aussi que les gens qui nient le génocide arménien se sentent en meilleure
    position. Or applaudir la Turquie pour être devenue ouverte signifie aussi
    que le débat devient plus compliqué.

    K.M. Vous avez dit que vous aviez parlé à des gens. Etaient-ils des
    officiels du gouvernement ?

    H.K. J'ai parlé à des officiels de très haut rang rencontrés par hasard
    dans un salon de thé. Il y avait parmi eux des dirigeants du parti AK, des
    gens qui étaient inquiets au sujet de la sécurité en Turquie, et aussi des
    intellectuels.

    K.M. Cette évolution dont vous parlez, concernant la position du
    gouvernement turc, est-elle une nouvelle stratégie de déni, ou est-ce un pas
    en direction du passé à affronter ?

    H.K. C'est les deux. Il faut comprendre que le gouvernement doit représenter
    les intérêts turcs, c'est là leur tche. Ce qui arrive exactement maintenant
    est que nous voyons une politique faite par le gouvernement de M. Erdogan.
    Sans aucun doute, cela fait partie d'une stratégie en rapport avec l'Europe.
    Il est évident que si on veut rejoindre l'Union Européenne, on doit avoir
    ouvert ses archives. Les archives ottomanes contiennent d'autres sujets,
    comme le Liban, la Macédoine, la question arménienne n'est qu'une partie de
    tout un ensemble.

    Il y a une discussion qui continue en Turquie. Quand j'ai parlé aux
    officiels turcs, j'ai été très franc, mais alors que les années précédentes
    ils me répondaient par une attaque personnelle, cette fois-ci ils ont fait
    une mise au point très claire et ont aussi posé des questions. J'ai aussi
    publié un article en Turquie sur les propriétés arméniennes abandonnées - le
    titre de l'article est: "Le génocide arménien" - J'ai été surpris
    d'apprendre que l'article était lu et discuté dans différentes universités.
    J'ai aussi reçu un appel pour des articles de la Société Historique Turque;
    elle me demandait de lui adresser une demande de participation pour l'an
    prochain. Ce qui est également remarquable, car cela signifie que la Société
    Historique Turque estime maintenant que je suis un universitaire, et pas
    seulement un propagandiste. Ce sont là des avancées dans la bonne direction.

    En ce moment, il y a un très grand intérêt en Turquie pour le point de vue
    adverse. Le nombre de publications en Turquie a augmenté terriblement et il
    y en a que je trouve très utiles. Ce ne sont plus des saloperies qu'ils
    produisent maintenant. Les livres qui étaient publiés n'étaient qu'un
    gaspillage d'arbres, juste des répétions de recyclage de recyclages.

    Je ne sais pas comment tout cela va finir. Mais pour le moment, ce qui se
    passe me fait plaisir.

    K.M. Vous avez mentionné la question des "propriétés abandonnées". Certains
    intellectuels qui ont étudié cet aspect du génocide arménien considèrent le
    vol des biens meubles et immeubles comme une partie intégrale du génocide,
    et soutiennent que ce vol a été organisé par les dirigeants du CUP.

    H.K. C'était l'Etat. C'était issu du sommet du gouvernement, de Talat à Ali
    Munit Bey. Le génocide arménien est la réponse du gouvernement ottoman à la
    Question arménienne. Les déportations ne peuvent être analysées qu'en termes
    d'expropriations. Ce fut le grand vol. Ce fut la séparation chirurgicale des
    Arméniens de leurs propriétés meubles et immeubles. Le gouvernement faisait
    très attention à ne pas gaspiller un bien quelconque, alors qu'il ne
    s'intéressait pas du tout au sort des Arméniens.

    Pour rendre l'expropriation permanente, il fallait remplacer les Arméniens.
    L'expropriation faisait partie d'un programme d'installation, ce processus
    créait un surplus de population, et on prenait soin de ce surplus de
    population. Les Arméniens, mathématiquement, étaient un surplus de
    population. Les tueries, ou, dans le cas des femmes et des enfants,
    l'assimilation résolvait le problème.
    Ce qui a eu lieu était un génocide, et non pas des massacres.

    En 1990, j'ai parlé du "soi-disant génocide arménien", j'étais étudiant en
    Allemagne, et la bibliothèque n'était pas très bonne, et à cause de cela je
    n'étais pas très bon moi-même. Après avoir commencé mon travail d'archives,
    au bout d'un mois, je parlais du génocide, et pas du "soi-disant génocide".
    Je ne suis pas simplement quelqu'un qui croit au génocide arménien; je suis
    quelqu'un qui a acquis cette connaissance par son propre travail. Personne
    ne m'a enseigné le génocide arménien, et personne ne m'a appris à employer
    ce mot. C'est le résultat de mon propre travail. J'emploie le mot car c'est
    le terme approprié qui couvre le phénomène. Plus j'étudie le génocide
    arménien, ses divers aspects et sa nature systématique, plus il devient
    évident qu'il n'y a qu'un seul mot pour le qualifier. Ce n'est pas une
    question d'avoir des préférences, si l'on veut se présenter comme un
    intellectuel, il faut employer le mot. Si l'on veut parler des massacres des
    Arméniens dans un village, ou des déportations dans un autre village, on n'a
    pas à employer le mot génocide, mais à partir du moment où on veut élargir
    la perspective, il faut employer le mot. Et tout intellectuel qui veut jouer
    le jeu, comme ceux qui vont à Erévan et disent à chacun "n'employez pas le
    mot "G", a un agenda politique.

    K.M. Certains intellectuels turcs se refusent à employer le mot "G" car ils
    disent que c'est hautement politisé, et qu'ils ne veulent pas être mêlés à
    la guerre entre nationalistes turcs et arméniens.

    H.K. Je m'en fiche des nationalistes arméniens et turcs, peu m'importe qui
    sont mes amis et qui ne le sont pas. J'emploie le mot "génocide" parce qu'il
    décrit exactement le phénomène. C'est le seul terme que nous ayons pour le
    décrire. Si un jour on trouve un meilleur mot, bon. Les langues anglaise,
    allemande et turque n'ont qu'un seul mot pour le décrire, si cela a une
    conséquence négative sur le gouvernement turc, c'est quelque chose que je ne
    peux pas changer, je ne peux pas changer l'Histoire. Je ne suis pas prêt à
    marchander là-dessus. Si un intellectuel turc dit que c'est trop politisé et
    qu'il (ou elle) ne veut pas employer le mot, qu'il (ou elle) change de
    sujet. Si on veut prendre part à ce débat, appliquer la terminologie exacte,
    et si on ne veut pas le faire, on n'est pas un intellectuel. Je n'aime pas
    le fait d'avoir des ennuis avec certains militaires turcs parce que
    j'emploie le terme exact. Si on ne veut pas assumer ses responsabilités, il
    faut changer de cap. Que certaines personnes vivant en Turquie eussent dû
    prendre certaines précautions, du moins dans le passé, est regrettable,
    c'est pourquoi je ne les provoque pas, mais je ne traite pas avec des gens
    qui n'ont pas de savoir universitaire sur la question, et qui soudain se
    lèvent et essaient de renégocier une terminologie académique.

    KM. Vous avez publié un certain nombre d'articles sur le rôle de
    l'Allemagne dans le génocide arménien. Ce qui se réfléchit dans vos articles
    est que parler d'une "complicité allemande" c'est aller trop loin.

    H.K. Notre connaissance du rôle de l'Allemagne est encore limitée, car les
    bombardements alliés ont détruit les archives militaires en 1945. Au moins
    99 % de l'ensemble a disparu. Pire que cela, toute une partie des archives
    de l'Ambassade d'Allemagne a aussi été perdue. Heureusement, la plupart des
    dossiers arméniens de l'Ambassade ont survécu. Ceci dit, nous avons une
    assez bonne idée de ce que faisait le Ministère des Affaires Etrangères
    allemand, et je viens justement de le décrire dans une nouvelle publication.
    La politique était d'aider les Arméniens quand cela ne nuisait pas à nos
    intérêts, et en même temps ne contrariait pas profondément les Turcs. Voilà
    ce qu'on a fait. On avait les mains liées, car l'alliance turque était
    importante. Les Compagnies privées, comme celle des Chemins de Fer de Bagdad
    ont aidé les Arméniens. Puis vous avez les missionnaires, certains très
    bons, et d'autres, comme Lepsius, se sont rendus plus brillants par la
    suite. Tout n'était pas aussi beau que certains chercheurs l'ont prétendu
    récemment. Puis on a les officiers, il y en avait un, Boettrich qui a aidé
    activement à la déportation; il y eu un autre officier, Wolffskeell, qui a
    tué des Arméniens de ses propres mains, mais il a été rappelé, en punition.

    Je n'ai pas de preuve que le Gouvernement allemand ait soutenu le génocide
    arménien ou même ait participé à la tuerie. Les preuves montrent plutôt le
    contraire. Pour avoir une meilleure compréhension il nous faut accéder aux
    Archives militaires turques, qui contiennent aussi des dossiers allemands.
    C'est pourquoi je dis que pour le moment tout est préliminaire. Mais le
    débat réel au sujet des Allemands, particulièrement l'hypothèse que le
    gouvernement ottoman était trop stupide pour savoir comment commettre un
    génocide, et devait se tourner vers les Allemands pour qu'ils lui disent
    comment procéder, et les tentatives de comparaison du rôle des Allemands
    dans le génocide arménien avec le rôle des Allemands dans l'Holocauste, est
    une sorte de complexe d'infériorité. Le génocide arménien peut se tenir
    debout tout seul. Il n'a pas à rivaliser avec l'Holocauste pour être validé.
    Il y a des différences majeures et structurelles. Toute la question de
    l'implication allemande est une diversion.
    La véritable moyen d'aller de l'avant est l'accès aux archives turques.

    La complicité des Allemands dans le génocide arménien est une invention
    politique et ne résiste pas à un examen minutieux.
Working...
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