Announcement

Collapse
No announcement yet.

Genocide : L'Engrenage; La Sanction Legale Risque De Nuire A La Rech

Collapse
X
 
  • Filter
  • Time
  • Show
Clear All
new posts

  • Genocide : L'Engrenage; La Sanction Legale Risque De Nuire A La Rech

    GENOCIDE : L'ENGRENAGE; LA SANCTION LEGALE RISQUE DE NUIRE A LA RECHERCHE
    Hemptinne Jerôme De

    Liberation
    25 octobre 2006

    Le projet de loi adopte par l'Assemblee nationale le 12 octobre
    concerne la negation du seul genocide armenien. Mais a terme se posera
    la question de son application a d'autres genocides, voire a d'autres
    crimes de masse. Pourquoi ne pas sanctionner aussi la negation des
    genocides cambodgiens ou rwandais ? Pourquoi ne pas etendre la loi
    Gayssot aux crimes contre l'humanite qui, selon la jurisprudence des
    tribunaux penaux internationaux (TPI), ne sont pas necessairement
    moins graves que les genocides ?

    En adoptant cette loi, le legislateur met le pied dans un engrenage
    dangereux. D'autant plus qu'il ne definit pas ce qu'il entend
    par "contester un crime" et, plus precisement, par "contester au
    point de se rendre coupable d'un delit sanctionne par une peine
    d'emprisonnement". Peut-on parler de negation coupable lorsqu'un
    chercheur, après avoir porte un regard critique sur un genocide ou un
    crime contre l'humanite, en vient a remettre en question son existence
    ? Ce chercheur est-il coupable au meme titre qu'un individu qui, se
    reclamant d'un discours pseudo-scientifique, deforme la realite dans
    le but d'innocenter un regime raciste, d'en accabler ses victimes
    ou de rehabiliter une ideologie criminelle? Le legislateur ne repond
    pas a cette question essentielle. C'est donc au juge qu'incombera la
    delicate tâche de trancher entre la negation coupable et la negation
    "sans intention de nuire". Un magistrat independant fera certainement
    cette distinction. Il n'empeche que toute personne desireuse de
    conduire des recherches susceptibles d'aboutir a la remise en cause
    d'un crime contre l'humanite ou d'un genocide sera placee sous une
    epee de Damoclès.

    En voulant sanctionner l'individu mal intentionne, le legislateur
    risque aussi de museler le chercheur de bonne foi. A l'evidence,
    ce dernier se doit d'etre d'autant plus prudent que son etude porte
    sur des sujets graves et sensibles. Toutefois, "graves et sensibles"
    ne veut pas dire "exempt de toute controverse". Certes, la communaute
    internationale s'est accordee sur une definition universelle du
    genocide dans la convention de 1948. Neanmoins, les divergences,
    exprimees recemment dans la jurisprudence des TPI, sur la determination
    des contours de cette infraction montrent combien la realite est plus
    nuancee et complexe. Des polemiques ont souvent eclate autour de la
    qualification juridique a donner a tel ou tel massacre, comme en
    temoignent les discussions a propos des evenements du Darfour. En
    tout etat de cause, il serait impensable que les universites,
    les instituts de recherche, les tribunaux internationaux et, plus
    generalement, le public se privent, sur toutes ces questions, de
    l'opinion d'experts qui, desormais dans la ligne de mire des juges,
    prefereront rester muets.

    *Les opinions exprimees dans ce texte sont celles de l'auteur et
    n'engagent nullement le Tribunal penal international ou l'ONU.

    Jerôme de Hemptinne juriste au TPI*.

    --Boundary_(ID_fnbrlb51F07sKXcL44+xIw)--
Working...
X