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Un Armenien en renaissance

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  • Un Armenien en renaissance

    L'Express, France
    18 juin 2007


    Un Arménien en renaissance

    de notre correspondante Nükte V. Ortaq


    Hrant Dink dirige un journal arménien. Son but: rendre sa fierté à sa
    communauté. Et s'il est critique envers les autorités d'Ankara, il
    l'est aussi envers la diaspora

    «Qu'est-ce qui est le plus important pour la Turquie? Qu'elle se
    démocratise? Ou qu'elle reconnaisse le génocide arménien?» interroge
    Hrant Dink, directeur de la rédaction d'Agos, un hebdomadaire
    arménien publié depuis six ans à Istanbul. Cette question obsède ce
    petit homme bouillonnant de 49 ans, qui mène une véritable révolution
    culturelle au sein de la communauté arménienne de Turquie. Le mois
    dernier, pour la première fois après vingt ans d'attente, il a enfin
    été autorisé à se rendre à l'étranger. Son nouveau passeport lui a
    permis de participer à un congrès sur les relations turco-arméniennes
    organisé à l'université du Michigan. En compagnie de plusieurs
    personnalités telles que l'historien Vahakn Dadrian, Taner Akçam et
    Richard Hovhannisyan, le journaliste turc Cengiz Candar ou le
    politologue Baskin Oran. «J'ai été très impressionné par tous ces
    intellectuels, confie le patron d'Agos. Je voudrais qu'ils viennent
    en Turquie, qu'ils voient comment nous vivons ici, qu'ils discutent
    avec des universitaires turcs.» Mais la plupart des historiens
    arméniens-américains hésitent à faire le voyage.

    Si la Turquie ne se démocratise pas, l'Arménie ne sera jamais en
    sécurité

    Né à Malatya, capitale de l'abricot, blottie au c`ur du plateau
    anatolien, passionnant et passionné, Dink se bat sur plusieurs
    fronts. Et c'est ce qui fait son originalité. Il n'appartient à
    aucune chapelle. Il n'a pas hésité, l'an passé, à venir, sur les
    plateaux de télévision, rappeler les injustices faites aux Arméniens,
    au moment même où les Turcs descendaient en nombre dans la rue pour
    protester contre l'adoption par le Parlement français d'une loi
    reconnaissant le génocide. En demandant, en direct, aux
    parlementaires qui participaient à la même émission quand l'Assemblée
    nationale d'Ankara avait, pour la dernière fois, abordé le problème
    de la minorité arménienne. Jamais, évidemment, d'où le silence gêné
    de ses interlocuteurs...

    «Seul le dialogue nous sauvera»
    S'il critique les autorités turques, Dink juge aussi sévèrement ceux
    qui, en France ou aux Etats-Unis, exploitent les massacres arméniens
    à des fins électorales. «Il ne faut pas chercher l'identité
    arménienne parmi les tombes de 1915. Je porte ma douleur en moi, au
    quotidien.» A ses coreligionnaires occidentaux qui affirment que les
    Arméniens de Turquie ont peur, il lance cette invite: «Venez ici, je
    suis prêt à discuter.» Car il se sent fier d'être un Arménien de
    Turquie. Et il se veut, avec son journal, le porte-drapeau d'une
    renaissance de cette communauté.

    Dans ce pays, les Arméniens, montrés du doigt et conspués dans les
    années 1970 à cause des attentats de l'Asala, se sont longtemps fait
    les plus discrets possible. Ils évitaient de répondre aux insultes
    des journaux qui les accusaient, sans preuve, de soutenir les Kurdes
    et leur chef, Abdullah Öcalan, qu'un ministre de l'Intérieur
    n'hésitera pas à traiter de «graine d'Arménien»... C'est dans ce
    contexte qu'est né Agos. Cet hebdomadaire bilingue, arménien et turc,
    est aujourd'hui vendu à 6 000 exemplaires. «Il fallait que les
    Arméniens se défendent!» tonne Dink. Avec ses éditorialistes, dont
    l'historien Taner Akçam et le politologue Baskin Oran, ses 30 jeunes
    journalistes, l'hebdomadaire souffle un vent de fraîcheur sur une
    communauté de 70 000 mes.

    Tout ne se passe pas sans accrocs. Ainsi, le journal fut saisi l'an
    passé pour avoir écrit que «les lois [sur le génocide, NDLR]
    cesseront d'être un problème lorsque la Turquie respectera la douleur
    créée par le 24 avril [date symbolique du début des massacres de
    1915]». Dink, auquel le ministère public avait intenté un procès, fut
    heureusement innocenté. Il en faudrait d'ailleurs bien davantage pour
    décourager cet homme qui a fait de la renaissance arménienne sa
    raison de vivre. «Je mets toute ma force dans l'amélioration des
    relations turco-arméniennes, dit-il. Si la Turquie ne se démocratise
    pas, l'Arménie ne sera jamais en sécurité.» Il est convaincu que la
    Turquie peut être une chance pour le jeune Etat au bord de
    l'asphyxie. «Même si cela peut paraître utopique, l'Arménie aura
    vraisemblablement demain, grce à la Turquie, la chance de compter un
    voisin appartenant à l'Union européenne.» Et d'ajouter, avec
    insistance: «Seul le dialogue nous sauvera.»

    http://www.lexpress.fr/info/monde/ dossier/turquie/dossier.asp?ida=325494

    From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
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