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Negationnisme: un proces test ouvrira sous tension mardi a Lausanne

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  • Negationnisme: un proces test ouvrira sous tension mardi a Lausanne

    Le Temps, Suisse
    3 mars 2007

    Négationnisme: un procès test s'ouvrira sous tension mardi à Lausanne;

    VAUD. Dogu Perinçek conteste qu'un génocide ait frappé les Arméniens
    en 1915. Il comparaît devant la justice suisse dans un contexte
    accidenté. La pénalisation du génocide gagne du terrain mais fait
    aussi l'objet de contestation accrue.


    Techniquement, c'est une affaire mineure. Elle sera traitée devant le
    Tribunal de police de Lausanne et l'accusé risque en théorie une
    peine maximale de 3 ans de prison, sans doute nettement moins en
    pratique. Mais sur les plans politique et symbolique, il en va tout
    autrement. Et la tension monte à toute allure autour du procès
    intenté pour négationnisme au président du Parti des travailleurs
    turc, Dogu Perinçek.

    Dans plusieurs discours prononcés à Lausanne et Winterthour en 2005,
    ce dernier a affirmé que le génocide des Arméniens était «un mensonge
    international». Les procédures ont été regroupées devant la justice
    vaudoise.

    Une première

    Si Dogu Perinçek est reconnu coupable, cela sera la première
    condamnation prononcée en Suisse pour négation de ce génocide. Un
    procès mené en 2001 à Berne contre douze Turcs de Suisse s'était
    conclu par un acquittement. Les prévenus n'avaient pas agi dans un
    but raciste, avait estimé le juge. Qui avait laissé la question
    historique ouverte.

    Depuis, plusieurs choses ont changé. Le 16 décembre 2003, le Conseil
    national a adopté une pétition reconnaissant aux massacres subis par
    les Arméniens en 1915 le statut de génocide. Le Grand Conseil vaudois
    a fait de même en 2005, contre l'avis du gouvernement cantonal et du
    Conseil fédéral.

    L'an dernier, c'est la Chambre française des députés qui a adopté une
    loi punissant la négation du génocide des Arméniens d'un an de
    prison. Ce texte doit encore passer la barrière du Sénat mais la
    question revient devant le Congrès américain, dont la nouvelle
    majorité démocrate semble bien décidée à reconnaître à son tour le
    génocide de 1915.

    La contestation monte

    Le filet se resserre donc autour de la Turquie, qui a toujours
    contesté qu'ait eu lieu en 1915 autre chose qu'un épisode, certes
    dramatique, d'une guerre à laquelle toutes les populations de
    l'ex-Empire ottoman ont payé leur écot sanglant. Mais parallèlement,
    la contestation monte contre le principe de confier à la loi le soin
    de distinguer les vérités historiques acceptables des autres, même
    sur la question ultrasensible des génocides.

    C'est dans ce contexte qu'en octobre 2006, Christoph Blocher a
    profité d'un voyage diplomatique à Ankara pour confier à ses
    interlocuteurs turcs que l'article 261 bis du Code pénal, qui prohibe
    le négationnisme, lui donnait des maux de ventre. Pascal Couchepin,
    qui lui a succédé au mois de février, a traité le génocide comme une
    question ouverte dont il a souhaité qu'elle soit soumise à une
    commission d'historiens.

    Entre-temps, le ministre de la Justice a mis un goupe de travail sur
    la question d'une éventuelle modification de la loi. Son rapport sera
    soumis au Conseil fédéral au printemps. En jeu, notamment, la
    question du négationnisme: comment éviter que les juges se voient
    invités à écrire l'histoire?

    A rigueur de texte, la négation d'un génocide n'est punissable que si
    elle intervient dans le but d'abaisser ou de discriminer. C'est
    l'absence d'un tel but qui avait motivé l'acquittement prononcé à
    Berne. Les accusés s'étaient limités, avait estimé le juge, à
    défendre la version de l'histoire qui prévaut dans leur pays.

    Une limite floue

    Mais la limite est floue. La négation d'un génocide avéré comporte un
    élément d'insulte à la mémoire des victimes qui peut être analysé
    comme un acte discriminatoire. Si l'on suit cette thèse, la question
    des intentions s'estompe: le négationnisme est une proclamation
    raciste.

    Reste, dans ce cas, à déterminer les génocides avérés. S'agissant des
    événements de 1915, le juge lausannois se trouvera dans une situation
    pour le moins inconfortable. Une moitié du parlement et la Commission
    des droits de l'homme de l'ONU ont reconnu le génocide. Mais pas le
    Conseil fédéral ni d'ailleurs l'ONU elle-même.

    Autre problème, Dogu Perinçek se présente entouré d'historiens
    internationaux qui contestent la réalité du génocide. Un tel moyen de
    preuve a toujours été refusé aux négationnistes de la Shoah. Mais la
    situation est-elle identique?

    Dogu Perinçek veut aussi défendre ses thèses en dehors du tribunal.
    Mais ses supporters ont renoncé à une conférence sur les événements
    de 1915. La salle communale de Renens leur a été refusée - avec
    beaucoup d'hésitation et en raison, explique la syndique Marianne
    Huguenin, du risque de trouble de l'ordre public. Plusieurs salles
    privées leur ont aussi filé sous le nez: avertis des inquiétudes de
    la police, les propriétaires ont préféré renoncer.

    Une conférence de presse sera quand même tenue lundi dans le centre
    turc de Renens - avec l'accord de la police. Et une manifestation
    silencieuse se déroulera place de la Riponne mardi matin.

    Encadré: L'accusé, un ultranationaliste qui campe à l'extrême gauche

    Par Sylvie Arsever

    Dogu Perinçek n'a pas le profil habituel des négationnistes de la
    Shoah. Leader d'une formation d'inspiration maoïste, le Parti des
    travailleurs, ce sexagénaire est un vieil habitué des luttes, des
    tribunaux et de la prison. Emprisonné après le coup d'Etat militaire
    de 1971, puis à nouveau en 1998 sous l'accusation de soutien au PKK,
    il a obtenu deux fois la condamnation de son pays à Strasbourg.

    Sa campagne très déterminée de négation du génocide de 1915 s'inscrit
    dans une rhétorique anti-impérialiste aux accents ultranationalistes.

    Il analyse les efforts menés au niveau international pour amener la
    Turquie à reconnaître le génocide comme un élément d'un plan
    américain visant, en dernier ressort, au démembrement de son pays.
    Une crainte qu'il n'est pas seul à ressentir en Turquie et que la
    montée en puissance du Kurdistan irakien après l'invasion américaine
    ne fait rien pour apaiser.

    Si l'écho politique du Parti des travailleurs est très modeste, une
    grande majorité de Turcs partagent sa position sur la question du
    génocide et le comité Talaat Pacha, du nom du ministre qui a fait
    passer la loi de déportation des Arméniens, qui le soutient, comprend
    des personnalités de tous les bords.

    Les hésitations de l'Europe sur l'adhésion turque ont fait remonter
    en puissance la question du génocide. L'assassinat au mois de janvier
    du journaliste et poète arménien Hrant Dink par un extrémiste a par
    ailleurs suscité un débat national sur la question du nationalisme.

    Dogu Perinçek s'est encore distingué dans cette affaire: pour lui, ce
    sont les Etats-Unis qui ont armé la main de l'assassin -pour diviser,
    en Turquie, Turcs et Arméniens.

    From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress
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