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Pensons y toujours, n'en parlons jamais.

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    ''Pensons y toujours, n'en parlons jamais.
    Par Albert Grigoryan


    Les victimes de la Raison d'Etat :

    Le rejet, par le Sénat, de la proposition de loi pénalisant la
    négation du génocide arménien a fait couler beaucoup d'encre, aussi
    bien en France et en Europe qu'en Arménie. Certains l'ont considéré
    comme ''une gifle française à l'initiative arménienne'', ou comme
    ''l'un des échecs les plus graves de la politique extérieure
    arménienne''. Pour d'autres, ''la décision du Sénat a été le résultat
    de la « diplomatie de football » initiée par le Président Sarkissian''
    ; ''ce n'était pas le bon moment puisque la France était occupée par
    la Lybie et les affaires africaines''. Personnellement, je pense que
    les raisons de ce rejet sont bien plus profondes.

    Certes, les législateurs français ont justifié leur refus d'inscrire
    le projet à l'ordre du jour du Sénat, estimant qu'il nuirait au
    processus de normalisation des relations arméno-turques. Le même type
    d'argument est utilisé par l'administration américaine chaque année, à
    l'occasion du discours annuel du président pour le 24 avril... Mais il
    s'agit là d'un affichage politique dissimulant la vraie raison : la
    Raison d'Etat de la France (et des Etats-Unis) prime sur les autres
    considérations. Le poids économique (créateur de milliers d'emplois en
    France et aux Etats-Unis), la position stratégique et l'importance
    politique régionale de la Turquie d'aujourd'hui sont des facteurs qui
    pèsent réellement sur l'Etat français (et américain). Les intérêts de
    la France (et des Etats Unis) sont également les intérêts des citoyens
    français (ou américain) d'origine arménienne.

    Les Grandes Nations n'évoquent les principes et la morale que
    lorsqu'ils sont en conformité avec leurs stratégies. Dans les affaires
    d'Etat, celui qui détient le pouvoir (politique, économique,
    démographique...) a souvent le droit (à l'écoute) pour lui, tandis que
    celui qui est faible a généralement tort aux yeux de la majorité du
    monde, disait Richelieu.

    En vertu des mêmes Raisons d'Etat, lors de la 1ère guerre mondiale,
    les Administrations des Grandes Puissances coloniales ont fermé leurs
    yeux et laissé le Gouvernement des Jeunes Turcs agir. Nous en
    connaissons les conséquences... Les Arméniens ont été sacrifiés sur
    l'autel de l'Histoire, dans l'indifférence quasi-totale des Grandes
    Puissances de l'époque. Le même scénario s'est produit lors de la 2ème
    guerre mondiale, avec les mêmes conséquences : l'expérience des Turcs
    a inspiré les Nazis, mais celle des Arméniens n'a pas servi de leçon
    aux Juifs... L'Histoire n'est donc pas indulgente avec la
    faiblesse. L'Histoire ne pardonne pas aux mauvais élèves...

    Le pragmatisme et le réalisme continuent de gouverner le monde. Les
    Grandes Administrations étatiques américaine, française, allemande et
    autres sont essentiellement dirigées par les polytechniciens,
    centraliens, énarques ou leurs équivalents américains et autres, pour
    qui la Morale relève souvent du domaine de l'émotion. Autrement dit,
    il est inutile de croire aux promesses électorales. Comme le dit le
    proverbe français, on n'est jamais mieux servi que par soi même...

    Ne laissons pas l'histoire se répéter, plus jamais ...

    Longtemps privée d'Etat et partagée/dominé pendant des siècles par
    l'Empire Ottoman, la Perse et la Russie tsariste, l'Arménie a retrouvé
    son indépendance suite aux convulsions qui ont agité le Caucase du Sud
    à la fin de la 1ère Guerre Mondiale. L'effondrement de l'Empire russe
    en 1917 a créé un vide politique dans la région du Caucase du Sud et
    provoqué la naissance de la 1ère République d'Arménie en 1918. Après
    deux ans et demi d'existence précaire, cette dernière a succombé à la
    collusion de la Turquie kémaliste et de la Russie bolchévique. Le 29
    novembre 1920 est née la (2ème) République soviétique d'Arménie qui ne
    couvrait qu'une petite partie du territoire de l'Arménie. 70 ans plus
    tard, l'effondrement de l'Union Soviétique a permis à l'Arménie
    d'accéder à son indépendance définitive. La naissance de la 3ème
    République arménienne, en 1991, a été très douloureuse, précédée par
    le tremblement de terre de 1988, suivie par les hivers froids et la
    guerre du Haut-Karabagh, mais le peuple d'Arménie en est sorti
    victorieux.

    Aujourd'hui, par un concours de circonstances, nous disposons enfin
    d'un endroit (espace géographique et politique) où nous tenir pour
    faire bouger le Monde (arménien) aurait dit Archimède. Il nous reste à
    présent, ensemble, avec la participation directe des Arméniens
    d'Arménie, de la Diaspora et du Haut-Karabagh, à faire évoluer le
    Monde arménien pour éviter de commettre une nouvelle erreur devant
    l'Histoire. Il est temps de faire un scanner de l'inconscient
    collectif, d'évaluer l'humeur de la Nation, de chercher des remèdes,
    de se débarrasser du complexe d'infériorité, de sortir du statut de
    victime qui nous hante depuis le génocide, de ranger aux archives
    certains des postulats de la période précédant l'indépendance de
    l'Arménie et d'en créer d'autres sur la base de l'histoire moderne et
    victorieuse afin de saisir l'opportunité historique qui s'est
    présentée à nous. Nous n'avancerons pas si nous considérons que le
    traumatisme du 1915 est insurmontable.

    La réhabilitation des traditions de l'Etat Nation arménien (de la
    Raison d'Etat et des intérêts nationaux) et la démocratisation de la
    société arménienne sont une priorité absolue. L'avenir de l'Arménie se
    construit aujourd'hui : repensons-le avec réalisme et pragmatisme
    comme le font les Grandes Nations. La meilleure réponse que le Monde
    arménien pourrait donner à l'Histoire pour le génocide arménien du
    1915 est le renforcement de l'Etat arménien, de son pouvoir de
    projection politique, économique, financier, diplomatique et surtout
    de ses capacités de défenses militaires. Les empires et les
    structures politiques artificielles construits sur le mensonge et/ou
    les cadavres ne sont pas éternels. Le bien mal acquis ne profite
    jamais. Ils finiront un jour par s'effondrer. Il faut s'y
    préparer. Pensons y toujours, n'en parlons jamais. Rien n'est
    impossible.''


    In French : http://www.armenews.com/article.php3?id_article=70419
    In Armenian : http://news.am/arm/news/60688.html
    In Russian : http://news.am/rus/news/60688.html

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