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Beyrouth: Pourquoi Le Negationnisme ?

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    POURQUOI LE NéGATIONNISME ?

    L'Orient-Le Jour, Liban
    24 avril 2013


    24/04/2013
    Par Serge GÃ~ILALIAN

    Des progrès notoires ont lieu en Turquie ces derniers temps. Le
    gouvernement turc négocie avec le PKK, son ennemi acharné ; il a
    avalisé une loi régulant l'immigration et le droit d'asile ; le
    Premier ministre souhaite établir un système politique décentralisé ;
    les femmes voilées apparaissent de plus en plus au travail, a
    l'université, dans les professions libérales. L'armée n'a plus voix au
    chapitre. La Turquie tourne le dos a Ataturk. La Turquie veut
    restituer son rôle perdu au début de la Première Guerre mondiale
    (Ahmet Davutoglu parle de néo-ottomanisme ; nous dirions plutôt
    néo-ottomanie).

    La Turquie continue de nier le génocide arménien.

    Pourquoi cela, alors que des voix turques se font entendre sur ce
    sujet depuis quelques années ?

    Pourquoi le génocide arménien n'est-il pas reconnu par la Turquie
    actuelle, du moment que cette république est en principe fondée sur le
    rejet de l'Empire ottoman ?

    Signalons ici que la Turquie a poursuivi le principe du génocide
    jusque dernièrement dans son combat avec les Kurdes. Entre-temps et
    depuis l'avènement d'Ataturk, tout ce qui n'était pas pur Turc a été
    éliminé : mis a part les Arméniens, ce sont les Grecs, les Assyriens
    et tous les autres chrétiens qui ont été annihilés selon le principe Â"
    La Turquie aux seuls Turcs Â". Même les Kurdes y ont eu droit alors
    même que des troupes kurdes (le bataillon Hamidiyé) avaient participé
    aux massacres de 1915, mais surtout deux décennies plus tôt entre 1894
    et 1896 sur le plateau anatolien, du temps de Abdul Hamid II.

    Ã~Icartons le fait que la Turquie ne souhaite pas du tout entendre
    parler de dédommagements aux Arméniens suite aux biens considérables
    qu'elle leur a confisqués durant cette période du début du XXe siècle
    pour sa guerre d'indépendance. Car le gros du financement de cette
    guerre d'indépendance provenait des biens et argent saisis aux
    Arméniens durant le génocide.

    Ã~Icartons aussi le fait que le mot Â" excuse Â" ne figure pas dans le
    lexique turc, ce qui est normal vu que les Turcs actuels sont en
    quelque sorte les héritiers des Ottomans eux-mêmes héritiers des
    Seldjoukides eux-mêmes cousins d'Attila et de Timour-Lenk dont on
    connaît les hauts faits pour l'humanité.

    Ã~Icartons enfin le fait qu'il y ait une continuité entre la période
    ottomane et la Turquie laïque d'Ataturk car des Ottomans ayant
    participé au génocide ont fait partie de l'élite politique et
    administrative du nouveau régime républicain, comme par exemple Ali
    Cenani bey (ministre de l'Industrie). Moustafa Kemal a fermé les yeux
    sur leur passé comme il avait fermé les yeux sur le génocide alors
    qu'il était engagé sur le front de Gallipoli. Cela l'arrangeait en un
    sens parce que ce génocide servait son idéologie de la race turque
    pure. N'oublions pas non plus qu'il avait voulu épurer la langue
    turque des souillures étrangères, arabes et persanes notamment.

    Alors pourquoi le génocide arménien demeure-t-il tabou en Turquie ?

    Pourquoi le simple fait de le mentionner rend les Turcs furieux ?

    Il semble qu'il y aurait une raison : l'ampleur des Turcs de souche
    arménienne, les crypto-Arméniens. Ils seraient des millions, selon une
    série d'historiens cités par le chercheur Bared Manok, mis a part les
    Arméniens du Hamchen qui se réduisent de plus en plus. Déja, dès le
    règne de Abdul Hamid II, les Arméniens étaient massacrés et leurs
    enfants islamisés et turquisés de force. Cette islamisation s'est
    poursuivie et a connu un pic durant le génocide soit parce que des
    rescapés avaient été sauvés par des Kurdes et s'étaient convertis pour
    échapper aux massacres, soit parce que des femmes et des jeunes filles
    avaient été enlevées, violées, violentées par les bourreaux puis
    intégrées de force dans des familles turques. Leurs descendants sont
    actuellement des Turcs d'origine arménienne. Certains le découvrent
    maintenant et tentent de remonter leur arbre généalogique. Quand ils y
    parviennent, ils se convertissent au christianisme et vivent leur
    arménité. Cela ne va pas sans des tiraillements et autres grincements
    de dents au sein de leurs familles. Il est donc probable que les
    gouvernements turcs qui se sont succédé depuis la naissance de la
    république craignent des remous considérables au sein de la société
    turque du fait de l'origine arménienne d'un pan important de la
    société turque. Cela porterait un coup dur a l'idéologie de la race
    turque, surtout s'il faudra dévoiler les archives ottomanes.

    Il ne faut pas se leurrer, les gouvernements turcs ne reconnaîtront
    pas le génocide arménien de sitôt. Le gouvernement actuel a déja
    entamé une vaste campagne de dénigrement a l'approche du centenaire du
    génocide (24 avril 2015). Il contacte même des écrivains arméniens Â"
    modérés Â" pour écrire des articles minimisant le génocide. Grâce a ses
    puissants lobbies, il fait pression tous azimuts pour que le génocide
    ne soit pas célébré dans certains pays allant même jusqu'a les menacer
    de sanctions économiques. Ã~@ l'intérieur, il n'hésite pas a abuser de
    l'article 301 de son code pénal pour incriminer les briseurs du tabou.

    Ainsi, en juillet 2012, il instruit un procès contre l'éditeur Rajip
    Zarakolu, premier Turc a avoir osé défier le tabou arménien dans son
    pays en publiant des livres sur le génocide arménien. Taner Akcam,
    sociologue et historien turc, professeur au Centre d'études de
    l'Holocauste et des génocides a l'Université Clarke (Minnesota) aux
    Ã~Itats-Unis, a écrit un livre sur le génocide qui lui a valu de
    nombreuses menaces en Turquie. Selon lui, la négation du génocide est
    une industrie en Turquie. Les actes négationnistes des Turcs ne
    s'arrêteront donc pas de sitôt.

    Que peut-on donc attendre d'un pays qui fait des mains et des pieds
    pour étouffer une tranche de son passé ?

    http://www.lorientlejour.com/article/811523/pourquoi-le-negationnisme-.html


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