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Armenie-Turquie : la diplomatie du foot

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  • Armenie-Turquie : la diplomatie du foot

    Les Echos, France
    Vendredi 16 Octobre 2009


    Arm©nie-Turquie : la diplomatie du foot

    par HUBERT-RODIER


    Dans les ann©es 1970, Henry Kissinger et Zhou Enlai avaient trouv© un
    moyen pour que les Etats-Unis et la Chine renouent des contacts rompus
    depuis 1949 : le ping-pong. Les pr©sidents turc, Abdullah G¼l, et
    arm©nien, Serge Sarkissian, ont pr©f©r©, eux, un sport plus haut
    risque : le football.

    Samedi 10 octobre Zurich, la Turquie et l'Arm©nie ont en effet sign©
    deux protocoles historiques qui visent ©tablir des relations
    diplomatiques normales et rouvrir la fronti¨re entre les deux pays.
    Tr¨s symboliquement, ces accords, qui doivent ªtre encore ratifi©s par
    les Parlements respectifs, ont permis Serge Sarkissian de se rendre
    en Turquie pour assister, en compagnie de son homologue turc, un
    match entre les deux ©quipes nationales Bursa. G¼l avait, lui, pu se
    rendre en septembre 2008 Erevan pour un match amical.

    Signe incontestable de d©tente, la diplomatie du terrain de foot est
    loin, cependant, de pouvoir r©soudre toutes les questions entre les
    deux peuples. A Bursa, l'hymne national arm©nien a ©t© siffl© par des
    ultranationalistes turcs. D©j, Zurich, il a fallu toute la pression
    des Etats-Unis, de la France et de diplomates europ©ens pour que les
    chefs de la diplomatie des deux pays se r©solvent mettre leurs
    paraphes en bas des textes, tant l'hostilit© ces accords est forte
    dans l'opinion publique des deux pays mais ©galement dans la diaspora
    arm©nienne. Le principal diff©rend porte sur la reconnaissance par
    Ankara du g©nocide arm©nien la fin de la Premi¨re Guerre mondiale
    dans l'Empire ottoman.

    Pourtant, le rapprochement turco-arm©nien ouvre la voie autre chose
    qu'un processus de r©conciliation entre deux pays. Il est un passage
    oblig© pour r©duire la tension dans le Caucase, comme le souligne un
    haut diplomate russe tr¨s satisfait de ce signal de d©tente dans cette
    r©gion. Il est la premi¨re ©tape, en effet, pour permettre un
    r¨glement du conflit du Haut-Karabakh, cette enclave en Azerba¯djan
    peupl©e d'Arm©niens o¹ a eu lieu l'une des plus graves guerres
    post-sovi©tiques. Et le temps presse, car si le cessez-le-feu depuis
    1994 a empªch© une guerre frontale entre l'Arm©nie et l'Azerba¯djan,
    des escarmouches le long de la ligne de partage ont fait, selon le «
    think tank » International Crisis Group, quelque 3.000 morts.
    Principal alli© de Bakou dans ce conflit, Ankara avait d©cid© de
    fermer sa fronti¨re en 1993 avec l'Arm©nie qui occupe toujours
    certaines parties de l'enclave.

    Le rapprochement avec l'Arm©nie doit permettre la Turquie de lui
    donner ce que souhaite le ministre des Affaires ©trang¨res du
    gouvernement Erdogan, « une profondeur g©ostrat©gique ».
    Paradoxalement, vraisemblablement la guerre entre la Russie et la
    G©orgie de l'©t© 2008 a marqu© un tournant pour la g©ostrat©gie dans
    le Caucase. Largement parce qu'elle a permis la Turquie d'agir, non
    pas en tant que pilier le plus oriental de l'Alliance atlantique, mais
    en tant que puissance r©gionale et de se rapprocher aussi de la
    Russie. Avant mªme Nicolas Sarkozy et l'accord de cessez-le-feu, le
    Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdothan, s'est rendu le 12 ao»t
    2008 Moscou pour pr©senter un nouveau plan pour le Caucase. Certes,
    cette initiative s'est heurt©e une r©action extrªmement prudente de
    la part de la G©orgie, qui y voyait un moyen de donner plus de poids
    encore la Russie dans les affaires r©gionales. Mais, comme le
    soulignait un rapport du « think tank » turc Tesev, il s'agissait
    surtout pour Erdogan de profiter de « l'affaiblissement temporaire
    mais visible du r´le des Etats-Unis » dans la r©gion la fin de la
    pr©sidence Bush. « Ce qui a permis la Turquie de montrer qu'elle
    pouvait mener une politique autonome », notait lors d'un s©minaire
    Istanbul, coorganis© entre Tesev et l'Ifri, Cengiz Candar, un
    politologue et ©ditorialiste turc.

    Pour Doroth©e Schmid, responsable du programme Turquie contemporaine
    l'Ifri, le rapprochement arm©no-truc est un signe qui doit permettre
    aussi un d©placement vers l'est de la diplomatie turque. Mªme si,
    ses yeux, cette diplomatie est court terme avec beaucoup
    d'affichages.

    Si la Turquie, actuellement membre non permanent du Conseil de
    s©curit© de l'ONU, a jou© un r´le de « go between » avec Isra«l et la
    Syrie ainsi qu'avec les Palestiniens ou encore en Irak, elle tente
    d©sormais de s'imposer comme une porte vis--vis de l'Iran. Ankara
    rejoint ainsi Moscou, en s'affichant contre un durcissement des
    sanctions contre T©h©ran pour son programme nucl©aire. Il est vrai,
    aussi, qu'Erdogan souhaiterait doubler les ©changes commerciaux avec
    l'Iran d'ici un an. En tout cas, si l'Empire ottoman n'est pas de
    retour, la Turquie, en jouant diplomatiquement sur tous les fronts
    r©gionaux, pourrait bien se pr©parer une carte de rechange une
    adh©sion l'Union europ©enne. Mais il lui reste encore r©gler une
    autre grande question : celle de Chypre, toujours divis©e entre une
    partie grecque, membre de l'Union, et une partie turque. Et on est
    encore loin du compte.
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