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EUROPE Desolidariser le debat sur la Constitution de celui sur...

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    Le Figaro, France
    23 février 2005

    Ne confondons pas les deux référendums !;
    EUROPE Désolidariser le débat sur la Constitution de celui sur
    l'entrée de la Turquie

    par GEORGES FENECH

    Dans le contexte politisé de la ratification référendaire de la
    Constitution européenne, il serait lourd de conséquences d'entretenir
    une confusion entre le débat sur la Turquie et celui sur la
    Constitution européenne, au risque de conforter les partisans du non
    et de mettre en péril une étape vitale pour la Constitution
    européenne. Un risque qui s'est davantage renforcé depuis le sommet
    européen du 17 décembre 2004, lorsque les chefs d'Etat et de
    gouvernement de l'Union européenne se sont prononcés en faveur de
    l'ouverture des négociations d'adhésion de la Turquie.

    Alors que la campagne pour le référendum sur la Constitution n'est
    pas encore commencée, nombreux, en effet, sont les leaders politiques
    « turcosceptiques », profitant de ce télescopage de calendrier, qui
    tentent de jouer sur la réticence des Français vis-à-vis de la
    candidature turque pour appeler à rejeter avec elle la Constitution,
    faisant croire que les deux non seraient naturellement solidaires et
    que dire non à la Constitution reviendrait à dire non à la Turquie.

    Face à cet amalgame savamment entretenu, il convient de rappeler avec
    force que tout d'abord un référendum sera, quoi qu'il arrive,
    organisé sur le seul thème de la candidature d'Ankara avant une
    éventuelle intégration effective de la Turquie. La Constitution
    prévoit en effet ce type de procédure pour tout autre futur Etat
    candidat. Aussi, loin d'impliquer automatiquement l'adhésion de la
    Turquie à l'Union européenne, contrairement à ce que voudraient faire
    croire les partisans du non, la Constitution renforce le principe de
    l'unanimité et rend par conséquent bien plus aisé le blocage du
    processus d'adhésion de pays candidats que ne le permettent les
    institutions actuelles.

    Rappelons par ailleurs que le traité constitutionnel prévoit un
    statut d'Etat associé spécialement pour les Etats voisins qui
    verraient leur candidature refusée. Mais une chose est sûre, la
    Constitution ne donne aucun droit automatique d'adhésion à la
    Turquie. En renforçant le poids du Parlement, elle conféra au
    contraire une plus grande légitimité démocratique à l'Union
    européenne en permettant plus de débats autour de questions
    essentielles comme l'élargissement, débats jusqu'à présent
    monopolisés par la seule Commission.

    Au moment de se prononcer sur l'adoption de la Constitution
    européenne, nos concitoyens, et en particulier les opposants de
    l'adhésion à la Turquie, doivent par ailleurs se remémorer, s'il en
    était besoin, que les fameuses « conditions de 1987 » posées au
    moment de la candidature d'Ankara demeurent un préalable
    incontournable à toutes négociations. Mieux, les derniers rapports
    d'étapes de la Commission (novembre 2003 et octobre 2004) et du
    Parlement européen (rapport Oosltander) n'ont jamais cessé de
    mentionner les fameuses « conditions de 1987 » sans lesquelles la
    Turquie n'intégrerait jamais l'Union européenne : 1) reconnaissance
    du génocide des Arméniens, 2) retrait de Chypre, 3) respect des
    droits de l'homme et des minorités religieuses non musulmanes
    sunnites.

    1) La reconnaissance du génocide arménien

    Force est de constater que l'Etat turc continue de nier le terrible
    génocide des Arméniens. Une rue importante d'Istanbul est toujours
    dédiée à l'organisateur du génocide, Talaat Pacha. De même les
    manuels scolaires nient toujours officiellement l'existence d'un
    génocide. Plus récemment, début décembre 2004, Ankara a même menacé
    de représailles la Slovaquie qui a fait reconnaître par son Parlement
    le génocide arménien. Pire encore pour les victimes du présent,
    Ankara refuse toujours de lever l'embargo azéro-turc qui pénalise
    l'Arménie enclavée.

    2) La question chypriote

    Autre « critère de 1987 » mais aussi du sommet de décembre dernier,
    non rempli, la Turquie refuse toujours, au risque de saborder son
    propre processus d'adhésion, de reconnaître la République de Chypre
    et persiste à justifier l'invasion de l'île en 1974 comme une
    conséquence du coup d'Etat grec. Or est-il besoin de rappeler que la
    République turque de Chypre du Nord n'a jamais été reconnue
    internationalement et bafoue ainsi les différentes résolutions de
    l'ONU enjoignant à Ankara de retirer ses troupes ? A cet égard, le
    premier ministre Erdogan n'ayant pas reconnu, à ce jour, la
    République de Chypre lors du sommet de Bruxelles, on ne peut que
    s'étonner de l'ouverture des négociations d'adhésion avec un pays qui
    refuse, envers et contre tous, de reconnaître un membre légitime de
    l'Union.

    3) Les droits de l'homme et des minorités

    Le fait qu'Ankara empêche toujours le patriarche orthodoxe
    Bartholomeus de porter son titre « oecuménique », que par ailleurs
    les églises assyro-chaldéenne, catholique et protestante ne soient
    pas reconnues et que l'état de siège soit rétabli de facto dans le
    Kurdistan montrent qu'Ankara ne partage pas encore le même esprit de
    tolérance que l'Union européenne, pour lesquelles le respect des
    minorités ethno-religieuses est essentiel.

    Ainsi tant la reconnaissance des minorités turques que le respect de
    la souveraineté de Chypre et qu'enfin la reconnaissance du génocide
    des Arméniens constituent aujourd'hui de sérieux obstacles à toute
    avancée de l'idée d'adhésion turque. Et il conviendra de juger Ankara
    d'ici au 3 octobre 2005, date d'ouverture effective des négociations
    sur sa capacité à adhérer non seulement aux réformes
    institutionnelles et démocratiques, déjà fort avancées certes, mais
    également aux sacro-saints principes et valeurs qui fondent
    l'identité de l'Europe moderne.

    On le voit, la route d'Ankara ressemble toujours au « chemin de Damas
    », même si au fond les Européens sont par ailleurs convaincus que ce
    grand pays ami, fort d'une civilisation ancienne, doit poursuivre ses
    efforts d'ouverture démocratique et pas seulement économique. Mais,
    d'ici là, ne nous trompons pas de référendum ! La France doit
    approuver sans crainte ni arrière-pensée une nécessaire Constitution.
    Si l'on veut que l'Europe devienne un acteur majeur et cohérent sur
    l'échiquier international, avec son ministre des Affaires étrangères,
    sa défense unie et une authentique démocratie institutionnelle.

    * Député du Rhône, vice-président du Comité bassin
    Méditerranée-Afrique au conseil d'orientation de la politique
    étrangère de l'UMP.
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